Monday, July 20, 2009

LES "DIRIGEANT" OUEST AFRICAINS A LA SOLDE DU LOBBY OGM


L’Afrique s’offre au coton transgénique

par Colette Thomas

source: http://www.rfi.fr/actufr/articles/078/article_44575.asp

A l’occasion d’un séminaire à Ouagadougou, huit pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre, annoncent qu’ils vont se lancer dans la culture de coton transgénique. Bénin, Burkina Faso, Mali, Tchad, Cameroun, Côte d’Ivoire, Ghana et Togo veulent diversifier leur production. L’idée est également de travailler à l’échelle régionale dans le domaine de la recherche.

Les ministres du Commerce et de l’Agriculture du Bénin, du Burkina Faso, du Mali et du Tchad ont assisté à ce séminaire à Ouagadougou ainsi que des représentants du Cameroun, de Côte d’Ivoire, du Ghana et du Togo. Tous ont un secteur cotonnier important. Cette réunion était organisée par la Banque mondiale et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour parler de la filière et chercher à renforcer ses atouts. Il a été notamment décidé de passer, en partie, au coton génétiquement modifié.

Un centre régional de biotechnologie sera créé dans l’un de ces pays producteurs ainsi qu’un observatoire régional des intrants agricoles, c’est-à-dire des additifs utilisés tout à la fois pour augmenter les rendements et supprimer les parasites et les mauvaises herbes. Une des recommandations adoptées à l’occasion de ce séminaire indique qu' « en plus des engrais, il y a lieu d’intégrer la question des semences et le passage aux OGM (organismes génétiquement modifiés) ». Le centre permettra donc d’observer l’évolution de la qualité des terres et la productivité. Ce centre de recherches étudiera toutes les pratiques agricoles en allant des plus traditionnelles utilisant des produits chimiques jusqu’aux plus novatrices utilisant des plants de coton transgéniques.

La possibilité de mener ces études agronomiques séduira probablement bien des chercheurs africains souvent tentés de partir dans les pays du Nord pour progresser dans leurs travaux. Pourtant, ce futur centre de recherche représente probablement la contrepartie offerte par les bailleurs de fonds aux pays producteurs de coton pour qu’ils se lancent dans la culture de coton génétiquement modifié.

L’exception du Burkina Faso

Jusqu’à présent, de tous ces pays, seul le Burkina Faso a commencé, en 2003, des cultures expérimentales de coton transgénique en collaboration avec le groupe américain Monsanto. D’autres pays producteurs se sont interrogés, comme le Mali. Pour commencer, Bamako a regardé l’expérience sud-africaine. Dans ce pays d’Afrique australe, les quatre-cinquièmes de la production de coton sont d’origine OGM. Et c’est Monsanto, l’un des rares groupes mondiaux à avoir mis au point des semences OGM, qui a convaincu le gouvernement de passer aux organismes génétiquement modifiés. Car l’Afrique du Sud plante également du soja et du maïs transgéniques en moins grande proportion.

A part le Burkina Faso, aucun des autres pays présents à cette réunion de Ouagadougou n’avait donc fait le pas. Lors d’une précédente réunion il y a tout juste deux ans, toujours à Ouagadougou, quatre chefs d’Etat ouest-africains s’étaient déclarés « favorables » à l’utilisation des organismes génétiquement modifiés dans leur agriculture, tout en voulant d’abord s’assurer que cette technologie agricole ne représente « aucun danger pour les populations et l’environnement ». Amadou Toumani Touré du Mali, John Kufuor du Ghana, Mamadou Tandja du Niger et Blaise Compaoré du Burkina Faso avaient donc dit « oui mais » à l’occasion de cette réunion organisée par le gouvernement américain. John Penn, le vice-ministre de l’Agriculture, était venu en personne présenter aux leaders africains « les avantages » de la biotechnologie.

Le Niger n’est pas venu au tout dernier rendez-vous. Lors du précédent, celui de 2004, le président Tandja avait déclaré : « C’est la vérité que la biotechnologie a révolutionné l’agriculture et pourrait tout aussi bien être utilisée pour améliorer les performances de l’agriculture africaine. Mais il me paraît fondamental que soient minutieusement étudiés et mis en exergue tous les contours de cette délicate question afin de nous édifier sur les impacts environnementaux, économiques et sociaux de cette matière encore peu connue de nos pays ».

Aller de l’avant

Un collectif d’organisations non gouvernementales burkinabé avait, il y a deux ans, présenté les OGM comme un « danger » pour l’Afrique, demandant un moratoire de cinq ans avant l’introduction de cette technologie agricole dans leur pays. Aujourd’hui le ministre de l’Agriculture du Burkina Salif Diallo souligne qu’« il est urgent d’aboutir à des décisions rapides et courageuses pour éviter de tomber dans le paradoxe des débats interminables ».

Car au-delà du choix des OGM, la filière africaine du coton a du mal à s’en sortir. Comme dans les autres secteurs économiques, le prix du baril de pétrole augmente les coûts. Et les producteurs américains et européens sont encore trop subventionnés, ce qui empêche les Africains de trouver leur place sur le marché mondial. Le ministre burkinabé de l’Agriculture a donc appelé de ses vœux la création d’un fonds de « lissage », demandant aux Etats-Unis et à l’Union européenne de prendre une part active à la création de ce fonds. Son objectif serait de « permettre au petit paysan de maintenir un prix acceptable pour son coton, de ne pas mourir avant que les négociations (à l’Organisation mondiale du commerce) ne se terminent ».

Plusieurs pays africains se sont depuis peu lancés dans le coton labellisé Max Havelaar, donc presque bio, le respect de l’environnement faisant partie des critères de labellisation du commerce équitable. Les producteurs sont donc en train de faire le grand écart entre une agriculture à connotation sociale et une autre, la plus technologique qui soit.

LES OGM A L'ASSAUT DE L'AFRIQUE DE L'OUEST


Afrique : la conquête de l’Ouest du coton transgénique

A partir du Burkina Faso, le coton transgénique a entamé subrepticement la conquête de l’Afrique de l’Ouest sans garde-fou.

Par Hance Guèye, Dakar

source: Afrique : la conquête de l’Ouest du coton transgénique

29-06-2009

L’Afrique de l’Ouest est déjà à l’ère des organismes génétiquement modifiés (OGM). Le Bénin a bien renouvelé pour cinq ans le moratoire sur les OGM, mais le Mali vient d’autoriser les essais de coton Bt et, surtout, le Burkina Faso s’y est mis, clandestinement d’abord, publiquement ensuite, une fois le pot aux roses découvert, depuis 2001.

Cette introduction s’est faite en violation d’au moins deux textes. La convention sur la diversité biologique, adoptée en 1992, et le protocole de Carthagène sur la biosécurité de 2000.

En 2008, douze mille hectares de coton ont été mis en culture pour la production de semences pour trois cent mille à quatre cent mille hectares au Burkina.

La porosité des frontières en Afrique est telle que, dès qu’un pays s’y met, tous les pays limitrophes sont contaminés. Or, expliquent les spécialistes, une plante contaminée ne peut revenir à son état antérieur et rien ne distingue à l’œil nu une plante génétiquement modifiée d’une autre. C’est peut-être le calcul fait par le fameux semencier américain Monsanto, en choisissant en 2001 le Burkina Faso, frontalier de six autres pays. Les essais au Burkina Faso ont donc valeur de test pour les OGM dans toute la région.

Violation

En 2001, la firme américaine a commencé, avec l’Institut de l’environnement et de la recherche agricole (INERA), dans le plus grand secret, les premiers essais de coton Bt, une variété locale à laquelle a été ajouté un gène tiré d’une bactérie du sol, Bacillus thuringiensis, mortelle pour certains ravageurs du coton.

Cette introduction s’est faite en violation d’au moins deux textes. La convention sur la diversité biologique, adoptée en 1992, et le protocole de Carthagène sur la biosécurité de 2000. Suivant les termes de ces traités internationaux, avant toute introduction d’OGM les pays doivent se doter d’un cadre législatif, prendre les plus grandes précautions, s’engager à informer la population des dangers et procéder à une large concertation publique.

Au Burkina Faso, c’est en 2003 seulement, incidemment, à l’occasion d’un atelier sur la biosécurité, que la Ligue des consommateurs a eu vent de ces essais. Pour toute réponse, Monsanto argua que les OGM constituaient un moyen de lutte contre la pauvreté en dynamisant l’agriculture burkinabée et que les essais étaient effectués dans des « espaces confinés ». En réalité des parcelles entourées de filets déchirés, révélèrent les associations.

Il faudra attendre 2006 pour que le pays des hommes intègres se mette en règle avec l’adoption par le Parlement, en avril, d’un texte sur le régime de sécurité en biotechnologie. La loi adoptée, malgré ses 75 articles, n’a pas fait le bonheur des associations de lutte contre les OGM parce qu’elle charge l’Agence nationale pour la biosécurité (ANB) de l’évaluation des risques, qui sont justement incontrôlables pour les OGM.

En Afrique, les contrôles sont encore plus improbables en raison de leurs coûts. Les citoyens sont donc privés de toute information, de tout élément objectif d’appréciation.

Revirement

Une fois le secret percé, le gouvernement burkinabé a fait des OGM son cheval de bataille dans la lutte pour l’amélioration des conditions paysannes, alors même que l’introduction avait valeur de test. Face à la volonté de l’Etat, l’Union nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB) s’est d’abord mobilisée avant de changer de position. Le front anti-OGM lie ce revirement aux 30% des parts dans la Société des fibres textiles (SOFITEX), la principale société cotonnière burkinabée, qui lui a été offerte. Ce revirement cassa le mouvement paysan avec la création, en 2003, du Syndicat national des travailleurs de l’agropastoral (SYNTAP), qui reprend le flambeau de la lutte contre les OGM.

Un combat bien inégal. Face au syndicat, il y a l’UNPCB et les trois sociétés cotonnières. Le privilège de fixer les prix du coton leur est dévolu par le gouvernement. Ce sont les usines qui distribuent également à crédit les insecticides, les herbicides et les semences, et collectent ensuite les récoltes. Le paysan est soumis au bon vouloir des industriels. Ceux qui seraient tentés de produire une autre variété de coton que le transgénique ne pourraient pas l’écouler.

Combat inégal

Le combat est-il ainsi perdu d’avance ? Il est en tout cas bien déséquilibré. Le front anti-OGM burkinabé a reçu le renfort de paysans du Bénin, de Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo pour former une Coalition pour la conservation du patrimoine génétique africain (COPAGEN), qui a organisé en février 2007 une caravane de sensibilisation au danger des OGM, mais ses moyens sont dérisoires face à la propagande de Monsanto qui soutient que ses semences augmentent les rendements de 45%, réduisent les coûts de 62%, soit une économie de 12 525 francs CFA par hectare (20 euros). Mais Monsanto garde secret le prix des droits de propriété intellectuelle qui devra s’ajouter au coût des semences.