Wednesday, April 15, 2009

Comment Monsanto vend les OGM

Enquête sur une stratégie de communication

Agnès Sinaï

Le Monde Diplomatique, Juillet 2001

Habituées à dicter leur loi aux gouvernements, les sociétés transnationales doivent maintenant compter avec un éveil civique susceptible de contrecarrer leurs projets. D’où la prolifération des « codes de bonne conduite » et autres « chartes éthiques » dont elles se dotent pour occulter ce qui reste leur unique objectif : garder les mains libres à l’échelle planétaire en vue de créer toujours plus de « valeur » pour l’actionnaire.

C’est dans le secteur de l’agrochimie qu’elles rencontrent le plus d’obstacles : les organismes génétiquement modifiés (OGM) ne « passent » pas dans l’opinion, tout particulièrement en Europe, aucune étude scientifique n’ayant pu conclure ni à leur innocuité ni à l’absence de risques pour la biodiversité liés à leur dissémination accidentelle, ni même se prononcer sur leurs prétendus bienfaits.

Les grandes firmes du domaine, en premier lieu Monsanto, ont donc déployé une stratégie de contournement. Il ne s’agit pas de prouver que leurs produits ne présentent aucun danger, mais de les promouvoir comme autant de remèdes aux problèmes de malnutrition et de santé publique du tiers-monde et, surtout, comme une solution de rechange à un péril, certes bien réel, celui des pesticides. avec des campagnes publicitaires minutieusement élaborées et massivement financées, elles espèrent bien « retourner » les esprits récalcitrants.
Par Agnès Sinaï

Etat d’urgence à Monsanto : après une alerte à la bombe sur son site français de Peyrehorade, dans le département des Landes, le numéro deux mondial des semences agricoles lance sur son réseau Intranet un protocole de sécurité en cas d’attaque cybernétique ou physique de ses employés. Ces derniers sont sommés de signaler tout comportement suspect, tout appel téléphonique non identifié et toute personne non badgée, ainsi que de fermer à clé toutes les portes, de verrouiller l’accès aux écrans d’ordinateur par des mots de passe et de ne pas utiliser de modem connecté à l’extérieur. Quant aux entretiens avec des journalistes, ils sont interdits sauf aux personnes expressément mandatées. Cette culture du secret n’est, du reste, pas complètement étrangère à l’actuelle directrice de la communication de Monsanto-France, Mme Armelle de Kerros, une ancienne de la Compagnie générale des matières atomiques (Cogema). Ce qui n’empêche pas Monsanto d’afficher une volonté de « transparence »...

Depuis le scandale de Terminator, première plante tueuse de l’histoire de l’agriculture (1), l’entreprise est partagée entre paranoïa défensive et agressivité. Les ennuis commencèrent lorsqu’elle racheta la firme Delta & Pine Land pour la somme de 1,8 milliard de dollars. Monsanto récupérait à cette occasion un brevet qui permettait un « verrouillage » des semences grâce à une ingénierie génétique inhibant leur repousse d’une année sur l’autre, ce qui conduisit l’organisation RAFI (The Rural Advancement Foundation International) à surnommer « Terminator » cette technique de stérilisation. Devant le tollé international qu’elle provoqua, le président de Monsanto, M. Bob Shapiro, annonça le retrait du produit, avant de donner sa démission.

Depuis lors, la multinationale a abandonné son slogan d’autrefois - « Nutrition, santé, avenir » - et elle cherche à se reconstituer une notoriété. Produire des OGM (on parle pudiquement de biotechnologies) est, en effet, une entreprise à hauts risques, aussi bien en termes d’image que d’investissements. Sans parler des accidents biologiques possibles : menaces sur la biodiversité et apparition d’insectes mutants, résistants aux insecticides incorporés dans les plantes transgéniques (2). Aux Etats-Unis, l’Agence de protection de l’environnement (EPA) a d’ores et déjà encouragé les agriculteurs à consacrer au moins 20 % de leurs terres à des plantations conventionnelles afin que des insectes non résistants au transgène Bacillus thuringiensis puissent se développer.

Autant d’aléas qui expliquent que, dans la valse des fusions-acquisitions et des restructurations, l’agrochimie, qui comprend les biotechnologies végétales (c’est-à-dire les OGM), soit systématiquement isolée des autres secteurs, de manière à compartimenter le risque transgénique. C’est dans cette logique qu’Aventis cherche à se désengager de CropScience, sa branche agrochimique. La firme avait en effet commercialisé le maïs transgénique Starlink, susceptible de provoquer des allergies chez les humains. Bien qu’il fût exclusivement destiné à l’alimentation animale, ce maïs s’était massivement retrouvé dans les chips et les corn-flakes des consommateurs américains, ainsi que dans les gâteaux de la marque Homemade Baking vendus au Japon. C’est également dans ce contexte qu’est né, en octobre 2000, le premier groupe mondial d’agrochimie, Syngenta - résultat de la fusion du suisse Novartis et de l’anglo-suédois Astra-Zeneca -, qui réalisera un chiffre d’affaires d’environ 8 milliards d’euros.

Monsanto, après avoir fusionné avec la grande firme pharmaceutique Pharmacia & Upjohn, ne s’occupe désormais plus que d’agriculture, avec un chiffre d’affaires de 5,49 milliards de dollars en 2000. Elle a cédé à Pharmacia son médicament phare anti-arthritique, le Celebrex, pour se spécialiser dans la production de produits phytosanitaires, de semences agricoles et, plus particulièrement, de semences génétiquement modifiées. Monsanto est maintenant le deuxième semencier mondial (après Pionneer), le deuxième phytosemencier après Syngenta et le numéro un en herbicides avec le Roundup, herbicide le plus vendu au monde (2,6 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2000, soit près de la moitié de celui du groupe). Son objectif est de faire accepter ses produits transgéniques en persuadant l’opinion qu’il vaut mieux consommer une plante génétiquement modifiée qu’une plante aspergée de pesticides (3). Pour faire sauter les derniers obstacles, cette stratégie se pare d’atours philanthropiques et écologiques.

Ne lésinant pas sur l’« éthique », Monsanto a ainsi adopté en janvier 2001 une nouvelle charte contenant cinq engagements : « dialogue », « transparence », « respect », « partage » et « bénéfices ». Selon le directeur général de Monsanto-France, M. Jean-Pierre Princen, les consommateurs européens - les plus réticents aux OGM - doivent comprendre qu’un organisme génétiquement modifié n’est rien d’autre qu’un organisme génétiquement amélioré. D’où la naissance du nouveau Monsanto, dit « projet M 2 » en langage interne : ses semences sont écologiques et bonnes pour la santé. Ceux qui en doutent sont simplement mal informés. Du passé faisons d’ailleurs table rase : qui se souvient que Monsanto produisait le défoliant, dit « agent orange », utilisé par les bombardiers américains pendant la guerre du Vietnam ?

Aujourd’hui, les équipes de la multinationale se réunissent à Hô Chi Minh-Ville pour y vendre leurs herbicides et pour y nouer des relations privilégiées avec les médias, les scientifiques et les membres du gouvernement vietnamien. Des Philippines à l’Argentine, il s’agit de disposer d’une latitude d’intervention sans limites : « Free to operate » (« carte blanche ») en jargon maison.
Un kit semence-herbicide

Pour la consommation externe, il conviendra donc de mettre en avant les vertus écologiques des OGM, dont le groupe commercialise deux variétés. Le gène Bt, d’abord, issu de la bactérie Bacillus thuringiensis, qui diffuse ses propres toxines insecticides, ce qui évite la vaporisation de pesticides supplémentaires : une récolte de coton dite « Bt », en subira seulement deux, au lieu de six à huit. Deuxième variété : le Roundup Ready, conçu pour résister à l’herbicide Roundup. L’agriculteur achète ainsi en kit à la fois la semence et l’herbicide ! Le Roundup est présenté par la firme comme un produit biodégradable, ce qui lui vaut un procès intenté par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de Lyon pour publicité mensongère.

Aux Etats-Unis, l’EPA estime que le volume annuel de glyphosate répandu se situe entre 20 et 24 millions de kilogrammes (4). Il est massivement utilisé pour la production de soja, de blé, de foin, dans les pâturages et les jachères. Depuis 1998, son utilisation a augmenté de quelque 20 % par an. Contenu dans le Roundup, il est l’herbicide le plus vendu au monde et rapporte chaque année à Monsanto environ 1,5 milliard de dollars. Le brevet a expiré en l’an 2000, mais la firme va conserver une partie du monopole grâce aux plantes génétiquement modifiées, conçues pour être tolérantes au glyphosate. En Bretagne, le glyphosate figure parmi les polluants importants et réguliers : jusqu’à 172 fois la norme en octobre 1999 dans l’Elorn, qui alimente en eau potable le tiers du Finistère, « ce qui prouve que le Roundup, dit biodégradable, est une imposture », explique le docteur Lylian Le Goff, membre de la mission biotechnologies de l’association France Nature Environnement. La pollution du sol, de l’eau et de l’eau de pluie, de l’ensemble de la chaîne alimentaire et de l’air par les pesticides est devenue un sérieux problème de santé publique que l’administration française a tardé à prendre en considération. D’où, pour le docteur Le Goff, « l’impérieuse nécessité d’appliquer le principe de précaution par une remise en cause de l’incitation à utiliser des pesticides, particulièrement lorsque celle-ci est encouragée par une publicité mensongère vantant l’innocuité et la biodégradabilité des produits à base de glyphosate ».

L’ingestion des pesticides par le consommateur serait nettement plus forte si les plantes génétiquement modifiées devaient se répandre, tant elles en sont imprégnées. Comme les dioxines, les pesticides - dont le glyphosate - ne sont pas biodégradables dans le corps humain, et ils constituent une pollution invisible (5). Leurs molécules cumulent des effets allergisants, neurotoxiques, cancérigènes, mutagènes et hormonaux en altérant la fertilité des mâles. Leurs propriétés sont comparables à celles des hormones femelles, les oestrogènes : globalement, ces actions hormonales seraient responsables d’une baisse de 50 % du taux de spermatozoïdes durant ces cinquante dernières années. Si ce déclin spermatique devait continuer, le clonage s’imposerait à l’espèce humaine vers 2060 !

Outre leurs prétendues vertus de biodégradabilité, les semences transgéniques compatibles avec le Roundup sont présentées par Monsanto comme « amies du climat » (climate friendly), puisque leur usage permettrait aux agriculteurs de réduire, voire de cesser tout labourage, permettant le stockage dans la terre de doses massives de gaz carbonique et de méthane, ce qui réduirait de 30 % les émissions du gaz carbonique des Etats-Unis. Reste à expliquer en quoi une mise en culture non transgénique serait moins efficace... Une seule certitude : les profits seraient moindres, notamment parce qu’une culture ordinaire se passerait de l’herbicide Round-up. La soudaine vocation écologique de Monsanto et le zèle de son « président pour le développement durable », M. Robert B. Horsch, convergent avec l’intérêt des vendeurs de droits à polluer, tels ces propriétaires terriens du Montana, d’ores et déjà rassemblés en une Coalition pour la vente de droits d’émission de gaz carbonique (6).

Si la phraséologie à usage externe du Nouveau Monsanto est centrée sur « la tolérance », « le respect » et « le dialogue », le vocabulaire stratégique se fait nettement plus cru en interne. La « philosophie » de la firme, telle qu’exposée par M. Ted Crosbie, directeur du programme de développement végétal, devant une assemblée de cadres de Monsanto-Amérique latine en janvier 2001, ne s’embarrasse pas de nuances : « Livrons en même temps le pipeline et l’avenir. » En clair, il s’agit d’inonder d’OGM les surfaces agricoles disponibles pour occuper le terrain - et de manière irréversible. L’Amérique latine est, de ce point de vue, « un environnement gagnant » : Monsanto évalue à 100 millions d’hectares les surfaces restant à « développer » dans le seul Brésil.

« Malheureusement, ce pays reste rétif aux OGM », regrettent M. Nha Hoang et ses collègues du groupe Monsanto chargés de la stratégie « free to operate » en Amérique latine : « C’est déjà le deuxième producteur mondial de soja transgénique, après les Etats-Unis, et ce sera sans doute bientôt le premier. C’est la plus grande puissance économique d’Amérique latine, mais c’est la seule où les plantations transgéniques n’ont pas encore reçu d’autorisation. Les juges ont pointé comme défectueux le processus d’agrément du soja transgénique Roundup Ready, au motif que les études d’impact environnemental appropriées n’avaient pas été menées, allant jusqu’à soutenir que l’agence existante de régulation des biotechnologies avait été constituée de manière illégale. » La régularisation du statut de l’agence en question, CTNBio, attend la ratification du Congrès brésilien... Objectif : déboucher le « pipeline » du soja transgénique pour entraîner d’autres autorisations de mise sur le marché : maïs Yieldgard, coton Bollgard et coton Roundup Ready en 2002 ; maïs Roundup Ready en 2003 ; soja insecticide Bt en 2005. En attendant, Monsanto investit 550 millions de dollars dans la construction d’une usine de production de son herbicide Roundup, dans le nord-est de l’Etat de Bahia.

La stratégie de la multinationale est centrée sur la biotech acceptance : faire accepter les OGM par la société, puis - ou concomitamment - inonder les marchés. Cela passe par de vastes campagnes de matraquage publicitaire. Aux Etats-Unis, les spots télévisés sont directement achetés par l’organe de propagande des entreprises du secteur, le Council for Biotechnology Information. Monsanto est cofondatrice de cet organisme qui centralise les informations relatives aux « bienfaits des biotech » : « La télévision est un outil puissant pour faire accepter les biotech. Alors surveillez les spots publicitaires et faites-les voir à votre famille et à vos amis », encourage M. Tom Helscher, directeur des programmes de biotechnology acceptance au siège de Monsanto, à Crève-Coeur (Missouri). Il s’agit notamment de rassurer les agriculteurs américains qui, notamment pour leurs marchés extérieurs, hésitent à acheter des semences génétiquement modifiées.

Si, aux Etats-Unis, Aventis Crop Science, BASF, Dow Chemical, DuPont, Monsanto, Novartis, Zeneca Ag Products ont lancé des campagnes de propagande, ces firmes hésitent encore à en faire autant en Europe... Au Royaume-Uni, l’équipe de commerciaux de chez Monsanto se félicite des résultats de son programme de « plaidoyer pour les biotechnologies ». Après une formation assurée par l’entreprise, il permet à ses commerciaux de s’autoproclamer « experts » en la matière, et d’aller ensuite vanter les mérites des produits transgéniques auprès des agriculteurs et dans les écoles. « Il n’y a rien de tel que trop de communication », se félicite M. Stephen Wilridge, directeur de Monsanto-Europe du Nord.

Le système éducatif constitue évidemment un enjeu stratégique pour la conquête des esprits. Le programme Biotechnology Challenge 2000, partiellement financé par Monsanto, a vu 33 % des élèves des lycées irlandais produire des rapports sur le rôle des biotechnologies dans la production alimentaire. Mobilisé pour distribuer prix et trophées, le commissaire européen chargé de la protection de la santé des consommateurs, M. David Byrne en personne, n’a « aucun doute sur le fait qu’il existe un lien entre les réticences des consommateurs vis-à-vis des biotechnologies et le manque sérieux d’information sur le sujet ». En 2001, le directeur de Monsanto-Irlande, M. Patrick O’Reilly, espère une plus vaste participation, car « ces étudiants sont les consommateurs éclairés et les décideurs de demain ».

La multinationale apprend à décrypter, voire à recycler les messages et les attentes de la société. Depuis quelques mois, Monsanto oscille entre des velléités de dialogue et un rejet viscéral des principales organisations non gouvernementales contestant les vertus supposées des OGM. A commencer par Greenpeace, qualifiée de « criminelle contre l’humanité » par l’inventeur suisse du riz doré, M. Ingo Potrykus, employé de Syngenta. Le riz doré est un riz transgénique enrichi en béta-carotène (vitamine A), donc un OGM de la deuxième génération, dit « alicament » parce qu’à prétention médicinale en sus de sa vocation alimentaire.

Premier riz thérapeutique de l’histoire de l’agriculture, il est très attendu par les grandes firmes biotechnologiques : avec lui, les derniers sceptiques ne douteront plus désormais du caractère fondamentalement vertueux du projet OGM. La vitamine A, intégrée par transgenèse, sera, au bout du compte, le promoteur moral de l’alimentation transgénique mondiale : qui s’aventurera encore à en critiquer les mérites, alors que tant d’enfants du tiers-monde sont frappés de cécité par carence en béta-carotène ? Qui osera désormais douter que la vocation du commerce de semences transgéniques ne soit véritablement nourricière, écologique et humanitaire ?

Reste que l’efficacité du riz doré auprès des populations concernées est sujette à caution : Greenpeace et d’autres le démontrent par l’absurde, arguant notamment, microgrammes à l’appui, que pour ingérer une dose quotidienne suffisante de vitamine A un enfant du tiers-monde devrait accomplir un tour de force : absorber 3,7 kilogrammes de riz doré bouilli par jour, plutôt que deux carottes, une mangue et un bol de riz. Réaction publique de M. Potrykus, lors d’une conférence de presse à Biovision, le « Davos » des biotechnologies, tenue à Lyon en février 2001 : « Si votre intention est de détruire les essais en plein champ de riz doré à but humanitaire, vous serez accusé de contribuer à un crime contre l’humanité. Vos actions seront méticuleusement consignées et vous aurez, je le souhaite, l’occasion de répondre de vos actes illégaux et immoraux devant un tribunal international. »
Contestation démoniaque

Criminels contre l’humanité, donc, tous ceux qui doutent et contestent, voire « démons de la Terre » (Fiends of the Earth), jeu de mots sur la dénomination anglaise des Amis de la Terre (Friends of the Earth) et nom de domaine d’un site Internet fort prisé du personnel de Monsanto. La contestation politique étant d’essence « démoniaque », le « dialogue » ne peut que tourner court. Pourtant, le nouveau Monsanto ne s’engage-t-il pas, dans sa charte déontologique, « à instaurer un dialogue permanent avec tous les acteurs concernés, afin de mieux comprendre les questions soulevées par les biotechnologies, ainsi que les préoccupations qu’elles suscitent » ?

Derrière cette apparente sollicitude, c’est une stratégie commerciale sans fard qui se met en place, celle de la double conformité : conformité a posteriori de l’image des produits OGM avec les attentes des consommateurs ; conformité des esprits, via le bourrage de crâne publicitaire et la communication intensive. Car si le seul et unique but de Monsanto est de faire passer son projet biopolitique mondial, le nouveau Monsanto a besoin d’afficher une éthique, forcément à géométrie variable puisque c’est la multinationale elle-même qui en fixe les règles. A cette fin, la société a confié à Wirthlin Worldwide, spécialiste mondial de la communication d’entreprise, le soin de « trouver les mécanismes et les outils qui aident Monsanto à persuader les consommateurs par la raison et les motiver par l’émotion ».

Ce sondage des esprits - baptisé « projet Vista » - est basé sur « la détection des systèmes de valeurs des consommateurs ». Il s’agit, à partir des données collectées, d’élaborer « une cartographie des modes de pensée, avec quatre niveaux (...) : les idées toutes faites, les faits, les sentiments et les valeurs. Aux Etats-Unis, les résultats de cette étude ont conduit à élaborer les messages qui percutent auprès du grand public, à savoir l’importance de l’argument en faveur des biotech : moins de pesticides dans vos assiettes ». En France, les employés de Monsanto ont été soumis à cette enquête lors d’un entretien confidentiel censé leur permettre d’exprimer librement ce qu’ils pensent des biotechnologies, « en bien ou en mal », l’objectif étant de former « des porte-parole qui utiliseront les messages définis pour le grand public ».

L’accès au matériel génétique, aussi bien qu’aux marchés, en bénéficiant d’une totale liberté de manoeuvre, est une double priorité définie par le concept « free to operate ». La mise au point d’un OGM coûte entre 200 et 400 millions de dollars, et prend entre sept et dix ans. En contrepartie de ce lourd investissement, la multinationale se doit d’obtenir une rente, assurée par la dépendance à l’égard du brevet déposé sur la plante. Pour pouvoir resemer d’une année sur l’autre, il faudra payer chaque fois des royalties à l’entreprise. Toute variété comportant un organisme génétiquement modifié sera protégée par ce brevet, ce qui, pour l’agriculteur, impliquera l’achat d’une licence. Le risque, à (court) terme, est bien de donner aux grandes firmes semencières la possibilité de bloquer tout le système, en monopolisant le patrimoine génétique mondial et en créant une situation irréversible : l’agriculteur ne pourra plus récupérer ce patrimoine pour redevenir sélectionneur lui-même.

Voilà qui pouvait poser problème à Monsanto, aux termes de sa propre charte, qui l’engage à « faire bénéficier les agriculteurs sans ressources du tiers-monde de la connaissance et des avantages de toutes les formes d’agriculture, afin de contribuer à améliorer la sécurité alimentaire et la protection de l’environnement ». D’où le généreux octroi du brevet sur la patate douce transgénique à l’Afrique du Sud, dans l’espoir d’une plus vaste implantation sur le continent noir : « En Afrique, nous pourrions patiemment élargir nos positions avec le Yield Gard, voire avec le maïs Roundup Ready. Parallèlement, nous devrions envisager d’abaisser ou de supprimer les droits sur nos technologies adaptées aux cultures locales, comme la patate douce ou le manioc. »

Une stratégie à double détente, affichant des intentions généreuses, afin de prendre pied sur les marchés les moins demandeurs, voire les moins solvables, mais potentiellement dépendants. Une démarche voisine de celle de l’implantation du riz doré de Syngenta en Thaïlande (dont la mise à disposition gratuite a nécessité la levée de quelque 70 brevets), ou de la vache à lait indienne dopée au Posilac de Monsanto, hormone interdite dans l’Union européenne, en vue de conquérir des marchés locaux peu portés sur les biotechnologies.
Risques de pollution génétique

Inversement, Monsanto a récemment fait condamner M. Percy Schmeiser, fermier canadien, à une amende de 72 800 F pour « piratage » de colza transgénique. L’intéressé a contre-attaqué en accusant Monsanto d’avoir accidentellement pollué ses champs de colza traditionnel avec son colza transgénique tolérant au Roundup. La justice est-elle en mesure d’établir l’origine d’une pollution génétique ? Ce cas, qui risque de se reproduire, montre la difficulté de contenir les disséminations accidentelles d’OGM. En France, celles-ci sont soumises à la loi du silence. Au mois de mars 2000, plusieurs lots de semences conventionnelles de colza de printemps de la société Advanta ont été semés en Europe, alors qu’ils étaient contaminés par des semences OGM d’une autre société. Les plants concernés ont été détruits. En août 2000, des variétés de colza d’hiver, contrôlées par la DGCCRF, se révélèrent être contaminées par des semences OGM. Or aucun OGM de colza n’est encore autorisé à la culture ou à la consommation en France.

D’ores et déjà, la traçabilité montre ses failles. Les contaminations fortuites deviennent très fréquentes. Un responsable sanitaire de Lombardie a récemment annoncé la présence d’OGM dans des lots de semences de soja et de maïs de Monsanto. Des OGM ont été repérés dans des stocks de semences de maïs entreposés à Lodi, près de Milan. La pression va monter en Europe, le soja importé - d’ores et déjà massivement transgénique - venant remplacer les farines animales désormais interdites.

Dès lors, l’objectif des firmes produisant des semences transgéniques n’est-il pas de voir disparaître la filière sans OGM, en tablant sur l’importance des coûts de contrôle qu’elle implique ? Il est probable que, dans les années à venir, les agriculteurs auront de plus en plus de difficultés à se procurer des semences issues de cette filière. La recherche mondiale s’orientant vers les semences transgéniques, il n’est pas impensable que les variétés non OGM finiront par être inadaptées à l’évolution des techniques agricoles, voire obsolètes.

On peut s’interroger sur la « transparence » affichée par Monsanto. Le consommateur est tributaire des informations fournies par l’entreprise. Chaque construction génétique est considérée comme un brevet, et il n’existe aucune obligation légale, pour une société, de fournir le test aux laboratoires privés permettant de réaliser des analyses de contrôle. En France, la description d’une construction génétique est déposée auprès de la DGCCRF qui, seule, peut réaliser des analyses. Comme elle n’est pas habilitée à le faire à titre commercial, elle ne peut donc pas être saisie à cette fin par des consommateurs ou industriels.

Le consommateur devra se contenter de savoir que l’entreprise ne commercialise ses semences qu’une fois autorisées pour l’alimentation humaine, et qu’elle s’est engagée à « respecter les préoccupations d’ordre religieux, culturel et éthique dans le monde en n’utilisant pas de gènes issus de l’homme ou de l’animal dans [ses] produits agricoles destinés à l’alimentation humaine ou animale ». La nomination récente à la direction de l’EPA américaine d’une ancienne cadre de la firme, Mme Linda Fischer, donne à penser que non seulement le nouveau Monsanto n’est pas hors la loi, mais qu’il veut la faire.


Source: Le Monde Diplomatique, Agnès Sinaï, Juillet 2001


(1) Lire Jean-Pierre Berlan et Richard C. Lewontin, « La menace du complexe génético-industriel », Le Monde diplomatique, décembre 1998.

(2) Le risque de dissémination non contrôlée a été l’un des motifs invoqués par M. José Bové et deux autres paysans pour justifier la destruction de plants de riz transgénique dans la serre du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), à Montpellier, en 1999. Condamnés à des peines de prison avec sursis le 15 mars dernier, les trois militants ont fait appel de cette décision.

(3) Les Editions de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) ont publié une bande dessinée (La Reine rouge, textes et illustrations de Violette Le Quéré Cady, Paris, 1999) dont la lecture et l’utilisation seraient, dit-on, recommandées aux personnels de Monsanto. Il s’agit, au nom des dangers des insecticides, d’un plaidoyer pour les OGM.

(4) Chiffres cités par Caroline Cox, « Glyphosate », Journal of Pesticide Reform, automne 1998, vol. 18, n° 3, édité par la Northwest Coalition for Alternatives to Pesticides.

(5) Lire à ce sujet l’ouvrage de Mohammed Larbi Bouguerra, La Pollution invisible, PUF, Paris, 1997.

(6) http://www.carbonoffset.org

ENJEUX DES OGM EN AFRIQUE


OGM: GENOCIDE ECONOMIQUE, SOCIAL ET ECOLOGIQUE DE l'AFRIQUE ET DE L'HUMANITE

La terre n’appartient pas à l’Homme.
C’est l’Homme qui appartient à la terre.


I. Enjeux et conséquences du coton Bt de Monsanto sur la filière cotonnière au Mali et dans la sous-région.

Le coton Bt génétiquement modifié (GM) de Monsanto

• Le dernier clou dans le cercueil des cotonculteurs et le cheval de Troie des multinationales de biotechnologie (Monsanto, Syngeta, Dow Agro Science, Bayer, etc.) pour le contrôle total de la filière et de toute l’agriculture vivrière au Mali et dans la sous-région.

Comme écrit GRAIN dans son rapport sur l’introduction du coton GM au Mali et dans la sous-région :

« Le coton Bt ( de Monsanto) est le cheval de Troie des multinationales ; leur porte d’entrée en Afrique de l’Ouest, pour assurer leur mainmise sur les semences cotonnières, et, éventuellement, pour contrôler toute l’agriculture de la sous-région. Le but est d'introduire en Afrique de l'Ouest les cultures génétiquement modifiées brevetée. »

Source : www.grain.org

Enjeux socio-économiques :

SPIRALE D’ENDETTEMENT ET FAILLITES DES COTONCULTEURS

• Culture de coton GM non-rentable pour les petits producteurs de coton en Afrique et dans les pays du Sud.

Coûts de production

• Coûts de production du coton GM largement supérieurs au coton bio et au coton conventionnel

• Coûts des semences largement supérieurs aux prix de semences bio et conventionnelles. (coût des semences Bt varie en fonction des pays)

a) Ex : Coûts des semences du coton Bt de Monsanto (Inde):

• OGM : 45 euro/ha
• Bio : 6 Euro/ha
• Conventionnel : 1.5 euro/ha

b) Coûts d’utilisation liés au brevet : (Bollgard 2: $100/ha = 45000- 50,000 FCFA/ha)

• Pas de réduction significative dans l’utilisation et dans le coût des insecticides:

• coût des semences GM (29,500 fcfa/ha) + coût du brevet du coton bt de Monsanto (45,000-50,000 fcfa/ha) largement supérieurs au cout des insecticides au Mali : 30,000-35,000 fcfa/ha

• Coton Bt ne combat pas tous les insectes ravageurs du coton, notamment les principaux qui prolifèrent au Mali et dans la sous-région.

• Requis 2 fois plus d’eau! En cas de sécheresse, faillite des cotonculteurs!

Rendement:

• Rendement inférieur au coton conventionnel : -35% en Inde ; 50 capsules contre 100 capsules pour le coton conventionnel.
• Les semences de coton Bt n’ont pas été génétiquement modifiées pour accroître les rendements.

Qualité

Qualité médiocre de la semence, de la graine de coton et de la fibre

• Témoignage publique de *William Dunavant ( *Président de la plus grande entreprise américaine de négoce du coton): « Je suis d’avis que la semence du coton bt est un problème très sérieux et beaucoup de gens partagent mon avis. »

Prix de vente

• Prix du coton Bt inférieur au prix du coton conventionnel à cause de la qualité inferieure de la fibre.
• Prix dicté par le marché mondial, manipulé par les spéculateurs et les multinationales en leur faveur (mécanisme économique et politique favorisant la surproduction) et influencé de manière préjudiciable par les subventions.

Coton GM ne résout pas le fond du problème de la filière:

• Subventions EU/UE => surproductions = chute des cours de la fibre
• Dévaluation du $US (conséquence de la politique monétaire frauduleuse de la Banque Fédérale Américaine (FED))
• Augmentation constante et exponentielle du coût des intrants.
• Conjugaison de ces facteurs (exogènes) est à la source de l’effondrement du secteur.
• Au contraire, le coton Bt de Monsanto ACCENTUE le problème en proposant comme solution à l’effondrement du secteur d’augmenter les rendements, dans un contexte de surproduction qui fait chuter les cours et qui est à la source de l’effondrement du secteur!

Perte et destruction de marché

• Perte et destruction des marchés dans les pays importateurs (UE, etc.) interdisant les produits OGM (ex: coton, café, cacao, etc. = principales cultures d’exportations de l’Afrique vers l’UE)

CONTAMINATION ET BREVETAGE DES SEMENCES

• Contamination génétique de toutes les semences cotonnières conventionnelles, bio, variétés sauvages, etc. = contrôle de toute la filière cotonnière au Mali et dans toute la sous-région à travers la contamination et la disparation progressive et la confiscation des semences traditionnelles contaminées à travers le mécanisme de brevetages des semences.
• Cotonculteurs interdits de sauvegarder et de replanter les semences l’année suivante :
• Légalement contraint d’acheter chaque année les semences et les produits phytosanitaires auprès de la multinationale qui détient le brevet sur les semences GM (Monsanto).
• Dépendance imposée par le biais du mécanisme de la semence « Terminator Seed» qui a été génétiquement manipulée pour devenir stérile après la première récolte.

Résultat:

• Dépendance totale des cotonculteurs auprès de Monsanto qui contrôle la semence GM, les produits phytosanitaires, et le prix d’achat du coton. Le cercle de la dépendance totale est bouclé.
• Spirale de l’endettement, faillite économique, saisi et privatisation des terres.
• Exemples: Suicides de + 150,000 cotonculteurs en Inde qui ont semés les « graines de la mort » depuis 2003.

Enjeux sanitaires et Ecologiques

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• Ignorances et incertitudes scientifiques absolues sur les conséquences de la manipulation génétique des organismes vivants et des semences sur la santé humaine, les animaux, l’environnement et sur l’ensemble de la biodiversité.
• Modifications des Lois de la Nature et de la Vie…: avec quelles conséquences…???
• Irréversibilité: flux de gènes bt dans l’environnement irréversibles!

CONFISCATION ET PRIVATISATION DES TERRES

Confiscation et privatisation des terres des paysans à travers 2 mécanismes :

1) Endettement et faillite économique des cotonculteurs:

• contrôle et coût exorbitant du prix des semences et des intrants + prix d’achat non-rémunérateur du coton fibre = non-rentabilité des paysans = endettement, faillite économique => saisis des terres.

2) Poursuites judiciaires

• Poursuites et actions juridiques contre des paysans - dont les champs et les cultures ont été involontairement et à leur insu contaminés par un flux de gènes Bt - pour violation des clauses juridiques relatives à l’utilisation du droit de brevet détenu par Monsanto sur la semence Bt. ( ex ; Persey Scheimer contre Monsanto, Court Suprême du Canada, $200,000 amendes!)

MONOPOLE DE LA CULTURE INDUSTRIELLE DU COTON AU MALI ET EN AFRIQUE PAR MONSANTO

• Contrôle total de la filière : les semences, les intrants, les terres, l’égrenage (privatisation sociétés cotonnières : ex-CMDT), et le prix et la vente de la fibre.

Conséquences :

• Cotonculteurs dépossédés de leurs terres, sans semences, sans emplois, sans revenus et sans avenir. (+ 10 millions en Afrique)

CONSEQUENCES PROBABLES DU MONOPOLE DE LA CULTURE DU COTON EN AFRIQUE PAR MONSANTO:

PLANTATIONS DE COTON CULTIVES AVEC LA MAIN D’ŒUVRE LOCAL

• paysans dépossédés de leurs terres seront recrutés comme travailleurs agricoles pour produire du coton sur les terres saisies.
• OGM: Permettent d’éliminer les subventions cotonnières et agricoles et de conclure l’accord commercial de l’Uruguay Round au sein de l’OMC pour la libéralisation mondiale de l’économie. note: Budget Farm Act 2009: Obama a demandé (en mars 2009) au Congrès américain la suppression des subventions cotonnières… !
• OGM: 1 pierre/2 coups: permet le contrôle de la filière cotonnière et de toute l’agriculture vivrière dans les pays du Sud et la libéralisation du commerce mondial. (OMC/Uruguay Round)

CONSEQUENCES : RETOUR A L’ESCLAVAGE DANS LES PLANTATIONS DE COTON!

• Les subventions cotonnières américaines avaient remplacées les esclaves africains sur les plantations de coton au Etats-Unis.
• Le coton Bt de Monsanto restitue l’esclavage dans les champs de coton en Afrique, 160 ans après l’abolition (officielle) de l’esclavage !
• L’Histoire se répète tragiquement, avec – une fois de plus – le soutien et la complicité des « dirigeants » africains…

II. Enjeux et conséquences des OGM sur l’agriculture vivrière et sur les populations africaines.

Mécanisme: contamination et brevetages des semences

• Contamination de toutes les semences et cultures vivrières à travers le coton GM et le brevetage des semences contaminées.

Note : les zones cotonnières du Mali et de la sous-région sont en même temps le « grenier » de la production vivrière…

Résultat:

• Contamination de toute l’agriculture vivrière au Mali et dans toute la sous-région à travers le coton Bt par la contamination et la disparation progressive des semences traditionnelles vivrières et de la confiscation et de l’appropriation des semences vivrières contaminées à travers le mécanisme du brevetage des semences.

Conséquences:

CONTROLE TOTAL DE L’AGRICULTURE VIVRIERE AU MALI, DANS LA SOUS-REGION ET SUR L’ENSEMBLE DU CONTINENT AFRICAIN PAR UNE POIGNEE DE MULTINATIONALE DE BIOTECHNOLOGIE!

• Disparition progressive et totale de toutes les semences vivrières traditionnelles à travers la contamination génétiques.
• Dépendance totale des paysans sur une poignée de multinationales de biotechnologie pour s’approvisionner en semences (5 multinationales détiennent actuellement +90% des semences vivrières génétiquement modifiées dans le monde (OGM))
• Contrôle de toute l’agriculture vivrière et donc de la vie de toutes les populations africaines entre les mains de ces multinationales…
• Contrôle des semences = contrôle de la nourriture = contrôle de la vie!

SAISI & PRIVATISATION DES TERRES

Saisi et privatisation des terres à travers les mécanismes suivants :

• contrôle et augmentation des prix des semences, des intrants, manipulation/baisse du prix d’achat des produits agricoles = non-rentabilité des paysans, endettement, faillite économique, saisis des terres.
• Poursuites et actions juridiques contre des paysans - dont les champs et les cultures ont été involontairement et à leur insu contaminés par un flux de gènes brevetés - pour violation des clauses juridiques relatives à l’utilisation du droit de brevet détenu par les multinationales de biotechnologie.

MONOPOLE ET CONTROLE TOTAL DE L’AGRICULTURE VIVRIERE

• Monopole des semences vivrières + privatisation des terres = contrôle de toute l’agriculture vivrière au Mali, dans la sous-région et sur l’ensemble du continent africain par une poignée de multinationales…

Résultat:

• Des millions de paysans vont se retrouver dépossédés de leurs terres et sans semences...( +80% des populations africaines vivent de la terre = + 700 millions personnes !)
• Comment vont-ils se nourrir… ? Que vont-ils faire pour vivre… ? Ou vont-ils aller… ?
• Dépendance totale de toute la population africaine sur une poignée de multinationales pour manger et donc pour vivre…
• Contrôle absolue sur la vie de millions de personnes en Afrique par une poignée de multinationales…
• Misère et chaos INDESCRIPTIBLE, famines, révoltes, guerres, etc.…

PRODUCTION DE BIO-CARBURANT

Les multinationales de biotechnologies vont privilégier la production de biocarburants sur les terres saisies et privatisées au détriment de la production vivrière pour servir les intérêts géopolitiques des Etats-Unis et des pays du G8:

• indépendance énergétique: Biocarburant (pourghere/jatropha).
• « arme alimentaire »: contrôle de la chaine alimentaire mondiale
• réduction des populations jugées « inférieures » et non désirables à travers la famine (politique de l’eugénisme)
• contrôle et accaparement des ressources géostratégiques des pays du Sud, etc. (Rockefeller/Kissinger, etc. (lire > NSSM 200, Henry Kissinger)

CONSEQUENCES DU COTON GM ET DES OGM EN AFRIQUE ET DANS LE MONDE.

PLUS GRAND GENOCIDE ECONOMIQUE, SOCIAL ET ECOLOGIQUE DE L’AFRIQUE ET DE L’HUMANITE !

Monsanto condamné pour corruption en Indonésie.

Le 6 janvier 2005, la Security and Exchange Commission (SEC), l’organisme américain chargé de la réglementation et du contrôle des marchés financiers, déclenchait une double procédure contre Monsanto, accusé de corruption en Indonésie. D’après le procureur de la SEC, dont les conclusions sont consultables sur Internet. Les représentants de Monsanto à Jakarta auraient versé des pots de vin évalués à 700 000 dollars à cent quarante fonctionnaires indonésiens, entre 1997 et 2002, pour qu’ils favorisent l’introduction du coton Bt dans le pays [1]. Ainsi 374 000 dollars auraient été « offerts » à la femme d’un haut fonctionnaire du ministère de l’Agriculture pour la construction d’une demeure luxueuse. Ces donations généreuses auraient été couvertes par des fausses factures de vente de pesticides. De plus, en 2002, la filiale asiatique de la multinationale aurait versé 50 000 dollars à un haut fonctionnaire du ministère de l’Environnement pour qu’il fasse annuler un décret exigeant que soit évalué l’impact environnemental du coton Bt avant sa mise sur le marché. Loin de nier ces accusations, le leader des OGM a signé un arrangement à l’amiable avec la justice, en avril 2005, le condamnant à payer 1,5 million de dollars d’amende. « Monsanto accepte l’entière responsabilité pour ces conduites incorrectes, a déclaré Charles Burson, le chef du service juridique de la firme dans un communiqué de presse, nous regrettons sincèrement que des gens qui travaillent en notre nom se soient permis de se comporter de la sorte [2] … »

[1] Peter FRITSCH et Timothy MAPES, « Seed money. In Indonesia, tangle of bribes creates trouble for Monsanto », The Wall Street Journal, 5 avril 2005 ; AFP, 7 janvier 2005

[2] Cité par Peter FRITSCH et Timothy MAPES, ibid. ; et AFP, 7 janvier 2005

IMPLANTATION CONTROVERSEE DE MONSANTO EN INDE

L’Inde est le troisième producteur mondial de coton après la Chine et les Etats-Unis, cette plante symbolique du monde agricole indien y est cultivée depuis plus de 5000 ans et fait vivre plus de 17 millions de familles, principalement dans les Etats du Sud (Maharashtra, Gujerat, Tamil Nadu et Andhra Pradesh).

Implantée en Inde depuis 1949, la société Monsanto y représente l’un des premiers fournisseurs de produits phytosanitaires, des herbicides et surtout des insecticides qui constituent un marché important, car le coton est très sensible à une foule de ravageurs comme le ver américain de la capsule, l’anthonome du cotonnier, la cochenille, l’araignée rouge, la chenille épineuse du cotonnier ou les pucerons. Avec l’avènement de la « révolution verte » au milieu des années 60, l’Etat a encouragé la monoculture intensive du coton avec des variétés hybrides de haut rendement nécessitant le recours à des engrais chimiques et l’usage massif de pesticides pour venir à bout des tous les fléaux attaquant le coton.
Cependant l’usage intensif d’insecticides synthétiques a entraîné un phénomène bien connu des entomologistes : le développement de la résistance des insectes aux produits censés les combattre. Résultat : pour venir à bout des parasites, les paysans ont dû augmenter les doses et recourir à des molécules toujours plus toxiques. C’est tellement vrai qu’en Inde, alors que la culture du coton ne représente que 5 % des terres cultivées, celle-ci totalise, à elle seule, 55 % des pesticides utilisés. Cette augmentation du recours aux produits chimiques a augmenté les coûts de production et a contraint les paysans a s’endetté encore plus. Il faut ajouter à cela la chute des cours du coton dans les années 90, qui est passés de 98,2 dollars par tonne en 1995 à 49,1 en 2001 notamment à cause de la politique de subvention américaine [1]. Cette chute des cours a fini par accabler les paysans endettés et a entraîné le début de la première vague de suicide, à la fin des années 1990.

Aujourd’hui l’introduction des semences génétiquement modifiées est considérée comme une seconde « révolution verte » ou « révolution génétique » par les observateurs indiens. Dès 1993, Monsanto négocie une licence d’utilisation de la technologie Bt avec la Maharashtra Hybrid Seed Company (Mahyco), la principale entreprise semencière d’Inde. Deux ans plus tard, le gouvernement indien autorise l’importation d’une variété de coton Bt cultivée aux États-Unis (la « Cocker 312 », qui contient le gène « Cry1Ac »), pour que les techniciens de Mahyco puissent la croiser avec des variétés locales. En avril 1998, la firme de Saint-Louis annonce qu’elle a racheté 26 % des parts de Mahyco et qu’elle a créé avec son partenaire indien une joint-venture à 50-50, baptisée Mahyco Monsanto Biotech (MMB), destinée à la commercialisation des futures semences transgéniques de coton. Au même moment, le gouvernement indien autorise la multinationale à conduire les premiers essais en champ de coton Bt.

« Cette décision a été prise hors de tout cadre légal », dénonce Vandana Shiva, la directrice de la Fondation de Recherche pour la Science, la Technologie et l’Ecologie, à New Delhi. Physicienne et docteur en philosophie des sciences. Cette figure internationale de l’altermondialisme a reçu en 1993 le « prix Nobel alternatif » pour son engagement en faveur de l’écologie et contre l’emprise des multinationales agrochimiques sur l’agriculture indienne. « En 1999, explique-t-elle, mon organisation a déposé un recours auprès de la Cour suprême pour dénoncer l’illégalité des essais réalisés par Mahyco Monsanto. En juillet 2000, alors que notre requête n’avait pas encore été examinée, ces essais ont été autorisés sur une plus grande échelle, à savoir sur une quarantaine de sites, répartis dans six États, mais les résultats n’ont jamais été communiqués, car on nous a dit qu’ils étaient confidentiels. Le Comité indien d’approbation du génie génétique avait demandé que soit testée la sécurité alimentaire des graines de coton Bt, utilisées comme fourrage pour les vaches et les buffles, et qui peuvent donc affecter la qualité du lait, ainsi que celle de l’huile de coton qui sert à la consommation humaine, mais cela n’a jamais été fait. En quelques années, Monsanto a réalisé un vrai hold-up sur le coton indien, avec la complicité des autorités gouvernementales, qui ont ouvert la porte aux OGM, en bafouant le principe de précaution que l’Inde avait pourtant toujours défendu. » [2]

Enfin Vandana Shiva dénonce l’opération de séduction lancée par Monsanto pour convaincre les décideurs indiens : « par exemple, en janvier 2001, une délégation américaine, composée de magistrats et de scientifiques, a rencontré fort opportunément le président de la Cour suprême, Justice A. S. Anand, à qui elle a vanté les bienfaits des biotechnologies, au moment où celui-ci devait se prononcer sur notre plainte. Dirigée par l’Institut Einstein pour la science, la santé et les tribunaux, elle lui a proposé de monter des ateliers pour former les juges sur la question des OGM . Monsanto a aussi organisé plusieurs voyages à son siège de Saint-Louis, auxquels étaient invités des journalistes, des scientifiques et des juges indiens. De même, la presse a été largement sollicitée pour propager la bonne parole. Il est atterrant de voir le nombre de personnalités qui sont capables de défendre mordicus les biotechnologies, alors que manifestement elles n’y connaissent rien… » [3]

Finalement le 20 février 2002, le Comité indien d’approbation du génie génétique donne son autorisation à la mise sur le marché des cultures de coton Bt, au grand dam des organisations écologistes.

[1] Les subventions accordées aux agriculteurs américains s’élevaient à 18 milliards de dollars en 2006 (voir Fawzan HUSAIN, « On India’s farms, a plague of suicide », New York Times, 19 septembre 2006)

[2] Le Monde Selon Monsanto, MM Robin, Co-editions La Decouverte/Arte Ed. 2008, p347

[3] Le Monde Selon Monsanto, MM Robin, Co-editions La Decouverte/Arte Ed. 2008, p348

OGM ET SUICIDES DES PAYSANS INDIENS

Noyés dans les brumes de la mousson, les champs s’étirent à perte de vue, bercés par le ronronnement des tracteurs et des pompes à eau. Dans le riche Etat agricole du Pendjab, buffles et bicyclettes sont passés de mode. Turban flamboyant, barbe au vent, les fermiers sikhs arpentent la campagne sur des motos pétaradantes. Ils ont tout connu de l’histoire agricole indienne : les cultures ancestrales, la « Révolution verte » des années 60, les rendements record, les plans gouvernementaux ambitieux et, depuis quelques années, l’émergence des géants de l’agroalimentaire. Ces grandes firmes, Bharti, Reliance ou Birla, ne s’y sont pas trompées.

Depuis quelques années, ces géants de l’industrie investissent des milliards de roupies pour prendre pied au Pendjab et rachètent à tour de bras des centaines d’hectares. Dans leur sillon, certains agriculteurs profitent eux aussi du « miracle » vert. Non loin de Ludhiana, un million et demi d’habitants, Devinder Singh possède ainsi 4 hectares. Il a choisi, il y a quelques années, d’abandonner la culture du riz et du blé pour celle des légumes. Avec ce résultat : il gagne cinq fois mieux sa vie qu’auparavant, « même si cela exige un travail fou », souligne-t-il avec le sourire. Il n’est pas seul. Sudhar Charangeet Singh, lui, s’est lancé il y a quelques années dans la culture des fleurs, un peu par hasard, parce que sa femme trouvait que « c’était joli ». Malgré la tâche, immense, il ne le regrette pas et vend sa production à une grosse entreprise privée. Il rêve de connaître un jour le même destin que Jang Bahadur Singh.

Installé près de Jalandhar, le « Roi de la pomme de terre » règne sur 2 500 hectares et 160 tracteurs. A 39 ans, il serait même le plus gros producteur au monde de semences de pommes de terre. Son secret : « Je vis dans la pomme de terre », admet en souriant celui qui a fait des études spécialisées aux Etats-Unis, dévore sur Internet toutes les innovations technologiques agricoles et participe même à des conférences à l’étranger sans jamais quitter son turban aux plis impeccables, d’un jaune... « patate » assumé.

Les ambitions agricoles des grandes entreprises et les quelques success stories de fermiers prospères cachent pourtant mal une situation tragique. Un paysan sur cinq, dans le monde, est indien. Or la majorité de ces 700 millions de paysans est pauvre et surendettée.

Les effets pervers d’un système.

Symbole d’un malaise qui touche tout le pays, depuis 2002, un paysan endetté se suicide toutes les trente minutes. Un désespoir qui s’exprime parfois politiquement, avec l’insurrection maoïste qui se développe en s’appuyant sur la défense des paysans sans terre, ou dans de gigantesques protestations des fermiers lésés face aux créations de zones industrielles franches. Dans la « nouvelle Inde », le paysan ne trouve pas sa place. « L’Inde se meurt et nous nous enthousiasmons pour des téléphones portables », s’emporte ainsi l’écrivain Arundhati Roy.

Au Pendjab, traditionnel grenier à grains du pays, ces tensions sont particulièrement exacerbées. L’Etat fut le laboratoire de la fameuse « Révolution verte » instaurée au milieu des années 60. Ses objectifs sont toujours en vigueur : nourrir le pays. Et ce d’autant plus que la population indienne augmente à présent plus vite que la production agricole. A l’époque, cette « Révolution », déployée à coups de semences ultraperformantes, d’engrais chimiques et de systèmes d’irrigation ultramodernes, fut une réussite. Dès 1968, les fermiers pendjabis, qui jamais n’avaient mangé de riz, produisirent des récoltes si abondantes qu’il fallut même réquisitionner les écoles pour les stocker. Avec ce résultat : l’Inde, qui mendiait sa nourriture aux autres pays, est devenue le 2e exportateur de riz et le 7e de blé. Mais la « Révolution » a aussi engendré d’innombrables effets pervers. Les paysans, dont les deux tiers possèdent des lopins inférieurs à 1 hectare, ont utilisé les techniques des grands exploitants sans en avoir les moyens. Selon l’écologiste Vandana Shiva, la Révolution verte, en déséquilibrant les campagnes, aurait même alimenté la violence de l’insurrection qui a secoué le Pendjab dans les années 80. Les terres ne cessent de se fragmenter, notamment en raison des lois sur l’héritage qui intègrent désormais les filles. Les champs sont saturés par la culture intensive, les terres « empoisonnées » par les engrais, les nappes souterraines dramatiquement surexploitées et les rendements aujourd’hui menacés.

Certes, en trois décennies les Pendjabis se sont enrichis. A Ludhiana, on compte 18 centres commerciaux, dont le Western Mall, avec ses deux pistes d’atterrissage pour hélicoptères, et le Golden Souk, un supermarché qui ne vend que... de l’or. Mais l’argent a aussi déstabilisé une société à peine éduquée, qui s’est lancée dans un consumérisme débridé. L’attrait pour le riche Occident séduit toujours davantage : légalement et illégalement, deux millions de Pendjabis vivraient à l’étranger. « Plus aucun de nos enfants ne veut être fermier », reconnaît Man Singh Sohana, qui vient de vendre à un promoteur immobilier des champs qui appartenaient depuis toujours à sa famille. Et sous le lustre en cristal de son salon, le vieil homme est catégorique : « Avant, sans argent, on était plus heureux. »

La pression financière est telle que les suicides des paysans du Pendjab, estimés selon les sources entre 2 000 et 40 000 sur dix ans, sont bien souvent liés à des dettes « sociales ». Au village d’Alamgi, Baldev Singh, 44 ans, s’est pendu cet hiver dans son étable, accablé par les 30 % d’intérêts sur le remboursement de sa maison. Avec un minuscule champ, l’augmentation des coûts de production et la baisse des subventions de l’Etat, il avait déjà été fragilisé par deux mauvaises récoltes. « Pourtant, il était honnête et travailleur », répète sa femme. Et pour cette fière agricultrice, qui a cultivé riz et blé toute sa vie, « la pire humiliation est d’acheter à présent la farine de blé au marché... » Son voisin, Kulwan Singh, 46 ans, a 12 000 euros de dettes. « Je me suis mis aux légumes, puis au sucre de canne , raconte-t-il. Personne n’a acheté ma production. Fini, les expériences ! Malgré les beaux discours, le gouvernement ne subventionne que la culture du riz et du blé. »

A Chandigarh, le docteur P. S. Rangi, consultant à la Commission des agriculteurs du Pendjab, extirpe de son armoire quantité de rapports alarmistes : la crise de la main-d’oeuvre, l’exode rural, l’assèchement des nappes...

« Révolution blanche » et cultures transgéniques.

Mais il tempère et vante les projets gouvernementaux prévus pour 2009 : « 700 coopératives vont être créées pour partager le matériel agricole, 125 000 serres pour les légumes et 2 500 fermes laitières à haut rendement... Ce sera la révolution blanche ! » A l’Université agricole du Pendjab, installée à Ludhiana, on cherche aussi des solutions. Récemment, ses chercheurs ont approuvé la culture controversée du coton transgénique, commercialisé par la multinationale américaine Monsanto. Des variétés performantes de lentilles sont fin prêtes dans les laboratoires et, à son bureau, sous une photo de Jawaharlal Nehru inaugurant les lieux en 1963, le docteur M. S. Kang, le vice-chancelier, a quantité de projets. Derniers en date : une niveleuse de sols à laser, un testeur pour fertilisants ou un engrais naturel. « Le travail consiste souvent à recycler les technologies occidentales à moindre coût », admet le docteur Kang. Mais rares sont ceux qui se nourrissent d’illusions sur la survie des petits fermiers : ces procédés sont en effet hors de leur portée. « La petite exploitation n’est pas viable , lâche le docteur Rangi. Un tiers des paysans du pays devront se reconvertir et travailler dans d’autres secteurs », confie-t-il.

Au Pendjab, les analystes préconisent le développement d’une véritable filière agroalimentaire afin d’employer les agriculteurs. Pepsi tente l’aventure-encore non concluante-et essaie de produire localement un jus de fruit. Mais beaucoup de politiciens préfèrent surfer sur le mécontentement paysan. Ils veulent redonner au fermier « sa souveraineté » et son indépendance. Mais chacun sait que le sort de ces centaines de millions d’Indiens est une tragédie et a des allures de bombe à retardement...

Source : Le point.fr Publié le 21/08/2008 N°1875 Le Point

GOVT INDIEN TENU RESPONSABLE DE LA VAGUE DE SUICIDES DES COTONCULTEURS

Les OGM exacerbent la pauvreté. Un comité des Nations Unies condamne le gouvernement indien pour son soutien aux semences transgéniques.

Au cours de sa 40ème session, le Comité des Droits économique

Au cours de sa 40ème session, le Comité des Droits économiques, sociaux et culturels, basé à Genève, a déclaré que les semences OGM produites par des corporations transnationales exacerbaient l’extrême pauvreté des petits paysans indien. La déclaration exacte, commentant la situation en Inde, est retranscrite ici :

« Le Comité se déclare profondément inquiet par l’extrême adversité dans laquelle se trouve les agriculteurs ce qui a entraîné une augmentation significative du nombre de suicides parmi les agriculteurs depuis dix ans.
Le Comité est particulièrement inquiet du fait de l’extrême pauvreté parmi les petits paysans qui a été provoquée par le manque de terres, d’accès aux crédits et d’infrastructures rurales adéquates, une situation qui a été exacerbée par l’introduction des semences génétiquement modifiées par des corporations multinationales et dont la conséquence a été l’escalade du prix des graines, des engrais et des pesticides, particulièrement dans l’industrie cotonnière. » [Traduction non officielle, référence E/C.12/IND/CO/5]

Il faut noter que de nombreuses organisations de la société civile ont pu présenter leurs travaux aux délégués du Comité durant la phase consultative en Avril-Mai 2008. Dans l’une des présentations, un représentant de Navdanya, venu de Delhi, a comparé le soutien du gouvernement indien aux OGM comme étant une forme de violation des droits de l’Homme.

L’introduction des OGM et la hausse des prix des intrants agricoles comme les engrais ou les pesticides, a eu un impact considérable sur les opérations des petits paysans marginalisés. Il n’est pas nécessaire de préciser que les plus touchés sont les cultivateurs de coton, qui voient régulièrement leur rendement baisser, leur récolte chuter, les besoins en pesticide augmenter, et ce malgré la promesse des compagnies transnationales qui annonçaient des semences résistantes aux maladies et améliorant les rendements. Ces promesses se sont toutes révélées fausses.

Le Comité a aussi encouragé les Etats à donner des subventions aux paysans les plus nécessiteux pour les aider à acheter des semences conventionnelles, ce qui leurs permettrait de replanter les graines sauvées d’une récolte à l’autre. Le Comité pense que cette stratégie permettrait d’éliminer la dépendance des paysans vis-à-vis des grandes compagnies semencières qui ne vendent que des graines brevetées dont le replantage est interdit.

Les lecteurs devront aussi noter que le Gouvernement Indien a approuvé la mise en essais de nombreuses cultures OGM sans avoir effectué aucun test de biosécurité.

Source : Traduction de Poverty exacerbated by GM seeds
UN Committee censures Indian Government’s support for GM seeds
By Arun Shrivastava
MyNews, Inde, 20 Mai 2008

Le Ministère de l’Agriculture de l’Andhra Pradesh demande réparation à Monsanto pour l’échec du coton Bt.

Suite à l’échec manifeste de la culture du coton Bt, le journal Times of India, réagit en interpellant sur les responsabilités de cette faillite et en soulevant la question du dédommagement des paysans accablés par leurs dettes afin de mettre fin à la vague de suicides. En effet, le journal rappelle qu’une loi indienne de 2001 sur la « protection des variétés végétales et des droits des agriculteurs » enjoint les sélectionneurs d’indemniser les paysans lorsque ceux-ci ont été « trompés » par les semences qu’on leur a vendues, que ce soit pour « la qualité, les rendements ou la résistance aux insectes nuisibles. » [1]

C’est précisément cette loi qu’a voulu faire appliquer le ministre de l’Agriculture de l’Andhra Pradesh. N’y parvenant pas, il a décidé en mai 2005 de bannir de l’État trois variétés de coton Bt produites par Mahyco Monsanto (lesquelles seront introduites peu après dans l’État du Maharashtra) [2] . En janvier 2006, le conflit avec la firme de Saint-Louis franchissait un nouveau cap : le ministre Raghuveera Reddy portait plainte contre Mahyco Monsanto auprès de la Monopolies and Restrictive Trade Practices Commission (MRTPC), l’organisme indien chargé du contrôle des pratiques commerciales et des mesures anti-trust, pour dénoncer le prix exorbitant des semences transgéniques ainsi que le monopole établi par le géant des OGM dans le sous-continent indien. Il devient de plus en plus dur de se fournir en semis non transgénique du fait de cette position monopolistique. Le 11 mai 2006, la MRTPC donnait raison au ministre de l’Andhra Pradesh, en exigeant que le prix du paquet de 450 grammes de semences soit ramené à celui pratiqué par Monsanto aux États-Unis ou en Chine, à savoir 750 roupies (12,5 euros) maximum et non plus 1 850 roupies. Cinq jours plus tard, la multinationale contestait la décision devant la Cour suprême, mais elle était déboutée de sa requête le 6 juin 2006, les juges estimant qu’ils n’avaient pas à interférer dans une décision qui relève de la seule compétence des États. [3]

Monsanto et Mahyco ont finalement baissé le prix des semences de coton Bt au prix du coton conventionnel mais refusent catégoriquement de payer les compensations aux paysans comme le voulait le Ministère. En janvier 2006, le gouvernement de l’Andhra Pradesh a fait pression sur la firme en menaçant de retirer les licences d’exploitations de semences Bt si Monsanto refusait d’indemniser les paysans pour les trois dernières récoltes. Cependant l’Etat provincial reste sans recours s’il n’obtient pas l’appuie du gouvernement fédéral qui a compétence dans l’autorisation de mise sur le marché des OGM. En attendant les OGM et le désespoir continuent de gagner du terrain dans les campagnes indiennes.

[1] The Times of India, 15 mars 2003.

[2] The Hindu Business Line, 23 janvier 2006. Il s’agit des variétés Mech-12 Bt, Mech-162 Bt et Mech-184 Bt

[3] « Court rejects Monsanto plea for Bt cotton seed price hike », The Hindu, 6 juin 2006.

PUBLICITES MENSONGERES RELATIVE AU COTON Bt DE MONSANTO EN INDE

Le coton transgénique Bt a été introduit dans l’Etat du Maharasthra en 2005 sous le nom de coton Bollgard, il est censé protéger contre les attaques du « ver américain de la capsule », un insecte ravageur de coton mais il est aussi capable de résister au pulvérisation de l’herbicide Roundup de Monsanto. Ce coton Bt est commercialisé par Monsanto et son partenaire commercial Mahyco. La première année, 55 000 paysans, soit 2 % des producteurs de coton indiens, acceptent de se lancer dans l’aventure transgénique. Alors que l’endettement des paysans est la principale cause de suicide dans cette tranche de la population rurale, Monsanto a axé sa campagne publicitaire indienne sur la qualité « miraculeuse » de ses semences qui permettent de réduire drastiquement les coûts de production liés à l’usage massif de pesticides et donc de sortir de la spirale de l’endettement. Dans un premier temps, ce fut en effet le cas et les paysans limitèrent les épandages de pesticides. Cependant la récolte de coton Bollgard ne fut pas à la hauteur des promesses de la publicité, comme le rapportent les paysans interrogés par The Washington Post, au terme de leur première récolte OGM : « J’ai été moins bien payé pour mon coton Bt, parce que les acheteurs ont dit que la longueur de sa fibre était trop courte, rapporte ainsi l’un d’entre eux. Les rendements n’ont pas augmenté, et comme le prix de la semence est si élevé, je me demande si cela valait la peine. » [1]

En effet, les graines de coton Bt sont plus chères car le brevetage des semences étant (pour l’heure) interdit en Inde, la firme de Saint-Louis ne peut pas faire appliquer le même système de « droit de propriété intellectuelle » qu’en Amérique du Nord, à savoir exiger que les paysans rachètent tous les ans leurs semences sous peine de poursuite. Pour compenser ses « pertes », Monsanto a donc décidé de se rabattre sur le prix des semences, en le quadruplant : alors qu’un paquet de 450 grammes coûte 450 roupies (7,50 euros) pour les semences conventionnelles, son prix s’élève à 1 850 roupies (30 euros) pour les OGM.

Au delà de ce surcoût à l’achat, l’avantage économique des OGM s’écroule aux vues d’une étude comparative réalisée en 2002 par la Coalition pour la défense de la biodiversité de l’Andhra Pradesh, regroupant plus de 150 ONG indiennes. Cette étude démontre l’absence d’avantage comparatif des cultures OGM de Coton Bt en Inde, ainsi « Les coûts de production du coton Bt ont été en moyenne plus élevés de 1 092 roupies (18,25 Euros) par acre que pour le coton non Bt, parce que la réduction de pesticides a été très limitée, écrivent les deux agronomes. De plus, la baisse de rendement a été significative (35 %) pour le coton Bt, ce qui a entraîné une perte nette de 1 295 roupies (22 Euros) en comparaison avec le coton non transgénique, lequel a enregistré un profit net de 5 368 roupies (90 Euros). 78 % des agriculteurs qui avaient cultivé du coton Bt ont déclaré qu’ils ne recommenceraient pas l’année suivante. » [2]

En outre, pour ajouter au désenchantement, de nouvelles maladies et parasites, comme le thrips du cotonnier et les mouches blanches, sont venus attaquer les cultures transgéniques, entraînant une chute des rendements et de la taille de la fibre du coton Bt ce qui fait chuter le prix de 20%. Une nouvelle maladie appelée la « rhizoctonia » a commencé à se développer particulièrement dans les champs de coton Bt. Un agronome commente : « Personnellement, je pense qu’il y a une mauvaise interaction entre la plante réceptrice et le gène qui y a été introduit. Cela a provoqué une faiblesse dans la plante, qui ne résiste plus à la rhizoctonia. D’une manière générale, ajoute Kiran Sakkhari, le coton Bt ne résiste pas à des situations de stress comme la sécheresse ou, au contraire, de fortes précipitations. » [3]

Une seconde étude, des mêmes agronomes indiens, a été réalisée concernant la saison 2005-2006. Si lors de la saison 2002-2003, c’est-à-dire l’année qui a suivi l’introduction des semences Bt, la consommation d’insecticides était inférieure pour le coton transgénique que pour le coton conventionnel, trois ans plus tard la « belle promesse » est définitivement enterrée : les dépenses en pesticides ont été, en moyenne, de 1 311 roupies (22 euros) par acre pour les producteurs de coton conventionnel et de 1 351 roupies pour les adeptes du coton OGM. « Ce résultat ne nous a pas surpris et ne peut qu’empirer, explique le docteur Abdul Qayum, car n’importe quel agronome ou entomologiste sérieux sait très bien que les insectes développent des résistances aux produits chimiques censés les combattre. Le fait que les plantes Bt produisent en permanence la toxine insecticide constitue une bombe à retardement dont on paiera un jour la facture, qui risque d’être très élevée, tant d’un point de vue économique qu’environnemental. » [4] En effet, le phénomène de résistance est bien connu des experts des OGM et constitue un tabou pour ses promoteurs. La résistance remet en cause l’argument de moindre usage de produit chimique et entraîne à l’inverse un usage de produits phytosanitaires toujours plus fortement concentrés pour venir à bout des parasites, ce qui au final permet à Monsanto d’engranger de beaux bénéfices sur ses ventes de Roundup et autres produits chimiques, le marché historique de la firme.

Nous voyons donc que les cultures OGM ne sont pas du tout adaptées à un modèle d’agriculture familiale et traditionnelle, et que leur introduction forcée entraîne des conséquences socio-économiques dramatiques dépassant le cadre du monde agricole.

[1] Cité par The Washington Post, 4 mai 2003.

[2] Abdul QAYUM et Kiran SAKKHARI, « Did Bt Cotton Save Farmers in Warangal ? A season long impact study of Bt Cotton — Kharif 2002 in Warangal District of Andhra Pradesh », AP Coalition in Defence of Diversity and Deccan Development Society, Hederabad, juin 2003,

[3] Le Monde Selon Monsanto, MM Robin, Co-editions La Decouverte/Arte Ed. 2008, p355

[4] Le Monde Selon Monsanto, MM Robin, Co-editions La Decouverte/Arte Ed. 2008, p356

LE COTON Bt DE MONSANTO ET LE GENOCIDE DES COTONCULTEURS INDIENS

Marie Monique Robin est allée enquêter en Inde sur une vague de suicides qui touche les petits paysans indiens depuis plusieurs années. Même si ce phénomène est lié à de nombreuses raisons socio-économiques inhérentes aux difficiles conditions de survie dans le monde agricole indien, une augmentation des suicides a été observée depuis l’introduction des semences de coton transgénique Bt.
L’enquête porte sur la région des Etats du Maharasthra et de l’Andhra Pradesh connus localement comme la « ceinture du coton ». Dans le Maharasthra, une organisation paysanne, la Vidarbha Jan Andolan Samiti (VJAS) recense les cas de suicides qui se maintiennent à une moyenne de trois par jours depuis plus de deux ans. Le leader du VJAS explique la situation en présentant une carte de recensement : « Ce sont tous les suicidés que nous avons enregistrés entre juin 2005, date de l’introduction du coton Bt dans l’État du Maharashtra, et décembre 2006. Cela fait 1 280 morts. Un toutes les huit heures ! En revanche, ici en blanc, c’est la zone où l’on produit du riz : vous voyez qu’il n’y a pratiquement pas de suicides ! C’est pourquoi nous disons que le coton Bt est en train de provoquer un véritable génocide … » [1] Malgré ces mots forts, le leader paysan reconnaît que les suicides existaient déjà avant l’introduction des semences transgéniques, mais aujourd’hui il y a une accélération préoccupante du phénomène. Selon le gouvernement du Maharashtra, 1920 paysans ce sont suicides entre le 1er janvier 2001 et le 19 août 2006 dans tout l’Etat, mais de janvier à décembre 2007, l’organisation VJAS a recensé 1 168 suicidés, ce qui confirme l’accélération [2]. Cette vague de suicide touche tous les Etats cotonniers du Sud comme l’Andhra Pradesh. Pour comprendre ce phénomène de désespoir qui touche les paysans indiens, il faut revenir sur les conditions d’imposition de la « révolution génétique » en Inde.

(Pour en savoir plus voir l’article L’impossible cohabitation entre le modèle agricole indien et la culture d’OGM)

lien: http://www.combat-monsanto.org/spip.php?article107

[1] Le Monde Selon Monsanto, MM Robin, Coéditions La Découverte/Arte Ed. 2008, p343

[2] Jaideep HARDIKAR, « One suicide every 8 hours », DNA India, 26 août 2006. Dans cet article, le journal de Mumbai (ex-Bombay) précise que, de sources gouvernementales, 2,8 millions de paysans de l’État (sur un total de 3,2 millions) sont endettés

MAIS Bt DE MONSANTO STERILE...

Les fermiers d’Afrique du Sud, qui s’étaient lancés dans la cultures de variétés de maïs GM vendues par Monsanto ,ont eu la désagréable surprise de découvrir que leurs plantes transgéniques avaient produit des épis dépourvus de graines.

La stérilité des plants de maïs touche trois variétés distinctes vendues par Monsanto, au total ce sont plus de 82 000 hectares de maïs transgénique qui sont touchés. En apparence la croissance du maïs était satisfaisante, mais en ouvrant les épis pour juger de leur maturité, les agriculteurs se sont aperçus que les plantes étaient stériles et n’avaient pas produits la précieuse graine jaune. Quelques 280 exploitants agricoles Sud Africains se sont déjà manifestés pour rapporter ce phénomène dans leurs champs.

Monsanto a aussitôt reconnu sa responsabilité et s’est engagée à offrir une compensation aux cultivateurs lésés. Monsanto explique l’échec de ses trois variétés de maïs par un problème « d’infertilisation qui se serait produit au cour du processus de fabrication dans les laboratoires ». L’évaluation des dommages est en cours avec la participation des coopératives locales, d’après Monsanto cela concernerait environ 25% des semences vendues la saison passée. Les variétés de maïs incriminées avaient été génétiquement manipulées pour résister à l’herbicide Roundup, le best seller de Monsanto, et pour produire une toxine insecticide. D’après Kobus Lindeque, directeur de Monsanto en Afrique, il ne s’agit pas d’un « problème lié aux modifications génétiques » qu’ont subies les plantes, mais « d’une insuffisante fertilisation durant la production des semences ».

Pour les fermiers sud africains, « c’est une bonne chose que Monsanto propose immédiatement de dédommager les fermiers pour les pertes subies. » dit Kobus van Coller, touché par le phénomène. « Personne ne pouvait dire d’extérieur que la plante était stérile, il n’y avait aucun signe de maladie ou de parasites, mais lorsqu’on a ouvert les épis, il n’y avait vraiment que très peu ou pas du tout de graines. » Reste à savoir comment seront fixées les compensations financières offertes par Monsanto et si tous les cultivateurs y trouveront leur compte.

En revanche, du coté des activistes environnementaux, les chiffres sont plus alarmant. D’après Marian Mayet, directrice du Africa Centre for Biosecurity à Johannesburg, certaines exploitations auraient subi jusqu’à 80% de pertes. Son organisation, l’une des principales en Afrique du Sud, appelle le gouvernement à établir un moratoire afin de conduire une enquête sur les raisons de cet échec du maïs transgénique de Monsanto. De plus, les organisations environnementales réclament plus de transparence sur la présence d’OGM dans l’alimentation, par la mise en place d’une politique d’étiquetage obligatoire des produits alimentaires, qui aujourd’hui fait défaut.

Au delà du fait que cette contre performance du maïs GM de Monsanto plombe la récolte 2009, cela pose également la question de l’approvisionnement alimentaire dans les pays du Sud. Comme dans beaucoup de pays africains, le maïs est l’aliment de base des 48 millions de Sud africains. Une chute de la production subite risque d’entraîner une hausse du prix des denrées alimentaires sur le marché local. Or, la part du budget pour l’alimentation est en moyenne de 50% pour une famille africaine (80% pour les plus pauvres), ainsi même une légère augmentation des prix pourrait entraîner un appauvrissement des populations les moins favorisées et avoir un impact négatif sur la nutrition de ces personnes. Dans un contexte de crise alimentaire mondiale, c’est un sujet sensible, surtout en Afrique où les multinationales de la biotechnologie cherchent à s’implanter au nom de la « lutte contre la faim ».

C’est aussi la question de l’oligopole du marché des semences contrôlé par Monsanto, et quelques compagnies, qui est posée. Comme nous le voyons ici, Monsanto est le principal fournisseur de semences génétiquement modifiées en Afrique du Sud, ainsi un accident dans sa chaîne de fabrication des semences se répercute directement sur l’ensemble de la production de maïs du pays. Ces dernières années, l’homogénéisation des semences industrielles au nom de la productivité s’est faite au détriment de la biodiversité et des variétés locales. Aujourd’hui on découvre le revers de la médaille de ces semences high-tech qui peuvent échouer de façon tout aussi homogène et bouleverser toute une récolte, perturbant ainsi l’ensemble de la chaîne alimentaire.

Comme certains militants le dénoncent, contrôler les semences ne revient-il pas à contrôler l’alimentation ? Est-il responsable de remettre l’approvisionnement alimentaire d’un Etat entre les main d’une multinationale étrangère ? La souveraineté alimentaire et le contrôle de la production agricole nationale ne seraient-ils pas des priorités stratégiques à poursuivre par tous les Etats ?

Des questions auxquelles devraient répondre tous les dirigeants politiques avant de céder aux sirènes des compagnies de biotechnologie, qui aiment tant se draper du voile de « sauveurs des affamés » pour vendre leur technologie.

Benjamin Sourice, chargé de campagne Combat Monsanto, le 2 avril 2009

Source : Digitaljournal.com, Afrique du Sud, du 29 mars 2009

OPPOSITION AU COTON Bt DE MONSANTO AU BURKINA FASO

Depuis ces dix dernières années, l’Afrique subit une pression de plus en plus fortede la part des pays du Nord, des Institutions Internationales (BM, FMI, OMC), et des multinationales de la biotechnologie afin d’introduire les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) dans les pratiques agricoles du continent sous couvert de modernisation des modes de production.

En Afrique de l’Ouest, en particulier, de nombreuses initiatives sont en cours (CORAF/WECARD, initiative du CILSS en Biosécurité, Plan d’Action pour la Promotion de la Biotechnologie et la Biosécurité dans l’espace CEDEAO, le projet régional Ouest africain -Bénin, Burkina Faso, Mali, Sénégal, Togo- de biosécurité), toutes ces projets ont pour objectif la promotion des OGM ou la création de cadres réglementaires propices à la vulgarisation des cultures transgéniques. Presque toutes ces initiatives sont financées par les mêmes partenaires : l’USAID, les multinationales de semence (Monsanto et Syngenta), CROPLIFE, avec le soutient de la Banque Mondiale.

Le Burkina Faso, qui a ratifié la Convention sur la diversité biologique, le protocole de Carthagène et qui a adopté les lois cadres de l’Union Africaine sur la biosécurité et les droits des communautés en juillet 2001, n’a pas résisté à cette agression. Bien plus, il a été le premier pays en Afrique de l’Ouest à s’engager depuis 2003 dans l’aventure de la transgénèse par l’introduction des essais de culture de coton Bt. Lors de la Journée Nationale du Paysan, il a été annoncé que la culture du coton Bt au Burkina se fera sur une surface officielle de 15 000 ha au cours de la campagne 2008, ce qui démontre le passage à une culture massive et non plus des essais.

Rappel des faits sur l’introduction du coton Bt au Burkina Faso :

- En juillet 2003, le BURKINA FASO devient le premier pays d’Afrique de l’Ouest à expérimenter le coton transgénique, sans avoir définit au préalable un cadre réglementaire conséquent pour protéger les populations et l’environnement des risques liés aux organismes génétiquement modifiés.

- Cette phase expérimentale s’est faite de façon opaque sans actions conséquentes pour informer/sensibiliser les populations sur le sujet.

- En juin 2004, un début de régularisation avec la mise en place d’un cadre législatif par l’adoption de règles nationales en matière de sécurité en biotechnologie a été amorcé et pas encore finalisé.

- En mars 2006, une loi portant sur le régime de sécurité en matière de biotechnologie, a été votée et des décrets d’application de cette loi sont toujours dans le circuit pour être examinés.

- A ce jour, seulement l’Agence Nationale de Biosécurité (ANB) et le Comité Scientifique National de Biosécurité ont été mis en place. Il reste encore à mettre en place un Observatoire National de Bio-surveillance, et des Comités Scientifiques internes de Biosécurité, comme le prescrit notre loi en son article 53.

- En septembre 2006, le Ministre d’Etat, Ministre de l’Agriculture, de l’Hydraulique et des Ressources Halieutiques décide de l´introduction et de la production du Coton Bt en champ pour la campagne 2007. Lors de la journée nationale des paysans en début d’année 2008, il déclare que le Burkina produira 15000 ha de coton Bt au cours de la campagne 2008/2009.

Si les autorités politiques se sont clairement prononcées en faveur de l’introduction et de l’utilisation des OGM dans l’agriculture burkinabaise, le débat reste âpre entre les chercheurs, le gouvernement et la société civile. Dans l’euphorie, certains leaders paysans et grands producteurs se sont déclarés favorables á l´introduction du coton Bt au Burkina Faso sans en mesurer les enjeux réels á tous les niveaux.

De façon générale et par rapport aux producteurs des pays de l’Afrique de l’Ouest, le public burkinabais et surtout les producteurs n’ont pas encore un accès suffisant à une formation/information objective sur la problématique de l´introduction des cultures transgéniques au Burkina Faso.

C’est dans ce contexte que la COPAGEN/Burkina s’est montrée soucieuse d’apporter une information juste et objective sur la problématique de la vulgarisation des cultures transgéniques et du brevetage du vivant au Burkina. C’est pourquoi la COPAGEN a organisé du 16 au 23 Février 2008, une caravane d’information, de sensibilisation et de partage d’expériences entre paysans de l’espace UEMOA et de la guinée Conakry. En effet, initialement prévue pour se tenir dans la zone Ouest du Burkina avec la participation des paysans de Sikasso (Mali), la caravane a connu la participation active des paysans de l’espace UEMOA et de la Guinée Conakry (zone d’implantation de la COPAGEN régionale) ce qui a permis la mise en place d’une seconde caravane parcourant l’Est du Burkina.

Déroulement et activités de la caravane

Deux caravanes sont parties simultanément de Fada à l’Est du Burkina Faso (province du Gourma où sont arrivés nigériens, togolais et béninois) et Bobo à l’Ouest du pays (province du Houet où sont arrivés Sénégalais, ivoiriens, guinéens et maliens) pour s’achever à Houndé dans la Province du Tuy. Elle a traversée les localités de :

- A l’Ouest : Bobo et Dandé (province du Houet), Koumbia (province du Tuy)

- A l’Est et au centre : Fada (province du Gourma), Mogtédo (province du Ganzourgou), Ouagadougou capitale du Burkina Faso et chef lieu de la province du Kadiogo.

A chaque étape, diverses activités ont été mises en place lors du passage de la caravane, comme par exemple :

- L’organisation de foire aux savoirs locaux (notamment en matière de valorisation de semences traditionnelles, de produits bio) à toute les étapes sauf celle de Ouaga.

- La sensibilisation des populations par des émissions télévisées, radiodiffusées, théâtres forum, animation culturelle (sketch, contes, chants, ballets), distributions de documents en français et en langue (dépliants, brochures, bulletins d’information) sur les OGM et sur les avantages du coton bio…

- L’Organisation d’une marche de protestation contre l’introduction des cultures transgéniques au Burkina Faso à Ouagadougou avec remise d’une déclaration et d’une demande de moratoire au Gouvernement.

- Des ateliers d’échanges inter paysans et des ateliers d’échanges avec des élus locaux ont été mis en place afin de favoriser le dialogue entre les élus et les producteurs de coton.

- Des visites de fermes agro écologiques afin de démontrer la viabilité de ces projets alternatifs.

- Conférences de presse, interviews des caravaniers, une campagne de communication médiatique pour toucher un large public. Tous les évènements ont été relayés par la presse nationale et internationale.

Objectifs atteints

Au total se sont plusieurs milliers de paysans et plus de 80 élus qui ont été touchés à Fada, à Dandé, Koumbia, et Houndé. La marche populaire a regroupé plus de 1000 personnes (organisations de producteurs, organisations de la société civile, Membres COPAGEN, les délégations étrangères…) dans les rues de Ouagadougou.

La caravane a permis de démystifier les OGM et surtout de lancer le débat public sur la question. Elle a aussi permis un éveil de la conscience populaire sur la question des OGM. Depuis le passage de la caravane, la COPAGEN/Burkina est très sollicitée pour des séances d’information et de sensibilisation au OGM dans les universités, par des organisations, par la presse... Certains producteurs initialement acquis à la cause du coton Bt, on clairement dit : « nous ne savions pas que c’était çà les OGM ! On ne nous l’avait pas expliqué ». D’autres sont allés jusqu’à réclamer la destitution des responsables de leurs organisations.

La caravane a suscité beaucoup de polémiques au sein des autorités politiques. Après la marche de protestation, certains responsables ont voulu empêcher la poursuite de la caravane surtout dans la ville de Bobo où les autorités ont en dernière minute boycotté l’activité mais aussi pour l’étape de Houndé où les autorités ont voulu interdire le passage de la caravane. Cette localité est connue pour être le fief d’un responsable de l’Union Nationale des Producteurs de Coton dont les dirigeants sont de mèche avec les autorités et les industries biotechnologiques pour l’introduction du coton Bt.

Globalement, partout où est passée la caravane les personnes rencontrées ont toutes montré la même surprise et la même colère face à l’absence d’information publique sur les OGM, un participant résumait le problème ainsi : « si c’est çà les OGM, nous n’en voulons pas ! Est ce que nos responsables travaillent vraiment pour notre bien ? Il faut dès à présent introduire partout l’information et la sensibilisation sur les OGM, les OGM ne passeront jamais par l’Afrique… ».

Source : COPAGEN, Afrique de l"ouest.

L’implantation rampante du coton Bt au Burkina Faso.

La question des Organismes génétiquement modifiés (OGM) reste assez mystérieuse pour le grand public. Dès leur apparition dans les années 80, ils ont suscité la controverse et l’inquiétude. Beaucoup y ont vu un progrès fantastique et prometteur pour le devenir humain, d’autres craignent qu’on ait ouvert une nouvelle boite de Pandore, et redoutent ses effets inconnus et non maîtrisables. Le débat scientifique, les batailles d’experts, ne doivent pas nous aveugler. Sous le couvert de la recherche scientifique, de gigantesques enjeux économiques se profilent. D’autre part, le Burkina Faso est le second pays africain, après l’Afrique du Sud, à s’engager résolument dans la culture du coton BT qui est génétiquement modifié. 15 000 hectares seront semés en plein champ cette année. Il serait temps que les Burkinabè sachent de quoi il s’agit, et qu’ils s’informent à d’autres sources que celles des multinationales qui produisent les OGM.

La cellule est l’élément constitutif fondamental de tout être vivant, animal ou végétal. L’homme est constitué de milliards de cellules. Au centre de chaque cellule se trouve le noyau, et à l’intérieur de ce noyau, il y a les "chromosomes". Ceux-ci sont porteurs du patrimoine héréditaire (ADN). Les chromosomes sont constitués de segments appelés "gènes". Chaque gène correspond à un caractère déterminé. Les gènes sont transmis des parents aux enfants. L’ensemble des gènes forme le "génome". Les scientifiques, sans égard pour l’étrange et mystérieuse complexité du vivant, sont intervenus dans le processus naturel pour fabriquer de nouvelles créatures. Ainsi ils sont parvenus à ôter un gène d’un organisme vivant pour le transférer dans un autre organisme vivant, afin de lui conférer un nouveau caractère héréditaire.

L’être vivant ainsi modifié est appelé : OGM. Depuis des millénaires, l’humanité a cherché à améliorer la qualité des plantes dont elle se nourrit et à les adapter aux conditions climatiques et géologiques. Mais elle l’a fait par la sélection et les croisements naturels des meilleures semences. Ainsi le maïs était une plante sauvage que les Indiens d’Amérique ont domestiqué pour en faire la céréale que nous connaissons. Le processus naturel des croisements a donné la "biodiversité", c’est-à-dire une grande variété au sein d’une même espèce : ainsi il y a du maïs blanc, rouge ou jaune, tendre ou farineux, adapté à tel ou tel sol, à telle ou telle altitude. Cette précieuse biodiversité est le résultat de l’observation et du travail d’innombrables générations de paysans.

Les croisements naturels entre espèces différentes sont impossibles. On appelle cela "la barrière des espèces". Une chèvre et un mouton ne peuvent pas procréer. Un singe et un être humain non plus. Certaines espèces voisines comme l’âne et le cheval ou le tigre et le lion, s’ils s’accouplent ne donneront qu’une progéniture stérile (le mulet, le tigron). La sexualité des plantes et des animaux est l’union dynamique du masculin et du féminin pour transmettre la vie. Or la manipulation génétique intervient avant la rencontre sexuelle. La plupart des généticiens considèrent l’organisme vivant comme un matériau dépourvu d’intelligence, comme des briques qu’on peut assembler et déplacer selon le but recherché. Pour eux, la vie n’est plus qu’"un vaste ensemble de réactions chimiques".

Quels sont les buts recherchés ?

Dans le domaine de l’agriculture -le seul que nous aborderons- il s’agit d’améliorer le rendement, la conservation ou la qualité d’une plante. Voici quelques exemples de créations déjà réalisées : un gène de porc introduit dans la tomate (plus de fermeté, meilleure conservation), un gène humain dans le saumon (poisson plus gros). Un savant a même inventé un lapin fluorescent pour distraire son équipe…

Mais nous allons revenir au Burkina Faso et porter notre attention sur la culture du coton BT. "BT" signifie qu’un gène d’une bactérie du sol (bacillus thuringiensis) a été incorporé à la plante de coton pour produire une toxine insecticide. Celle-ci est mortelle pour les chenilles qui la mangent. Ce qui a pour avantage de réduire considérablement les traitements insecticides nécessaires pour protéger le coton (de 6 à 2 en principe) et par suite d’augmenter le rendement. Le coton BT est produit par la firme américaine Monsanto qui prétend ainsi résoudre les problèmes des paysans africains et contribuer à la lutte contre la pauvreté. Les sceptiques ne seraient que des gens tournés vers le passé qui refusent le "progrès".

Le coton BIO :

Depuis 1999, l’ONG suisse Helvétas a lancé au Mali puis au Burkina Faso la culture du coton biologique, c’est-à-dire sans intrants chimiques. Il occupe encore des surfaces modestes bien que ses résultats soient très intéressants : les paysans s’engagent à n’utiliser aucun engrais ni pesticide chimiques qu’ils remplacent par le compost et les produits naturels. Le rendement est inférieur à celui du coton conventionnel, mais largement compensé par l’économie de traitements chimiques. Ainsi le coton bio, très demandé en Europe, est payé 300 CFA le kg (contre 145 CFA en 2007 pour le coton conventionnel) . Avantages : les sols sont préservés, les revenus sont décents et la méthode est à la portée des petites exploitations familiales. De plus, pas d’endettement, et pas d’empoisonnement par les produits toxiques… Par contre, cette culture nécessite la formation des paysans et un suivi qui ne permet pas pour l’instant de dépasser 10 000 petits producteurs.

L’implantation rampante du coton Bt.

La SOFITEX n’est guère favorable à cette initiative qui la prive, elle et ses actionnaires, des revenus des intrants qu’elle vend aux cotonculteurs et qui constituent une part importante de ses bénéfices. A l’examen de tous ces risques et incertitudes, et en considérant des solutions plus appropriées au contexte africain, on a du mal à comprendre comment le coton BT pourrait résoudre les difficultés des cotonculteurs. D’autant plus que leurs véritables problèmes sont ailleurs : les sécheresses dues au réchauffement climatique, les criquets, la concurrence asiatique, et les subventions accordées aux cotonculteurs américains qui font baisser le prix du coton africain. Mais alors ? Pourquoi tant d’enthousiasme de la part des responsables du Burkina Faso ?

Le 19 février 2008, le professeur Maxime Somé et l’ancien ministre des Ressources animales, M. Alassane Séré, tous deux membres du BBA (Burkina Biotech Association) ont donné une conférence de presse organisée par l’ISAAA (International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications) qui avait pour but de rassurer la population burkinabè au sujet des OGM en leur apportant une information "saine et juste". Après avoir qualifié le front anti-OGM de "rêveurs", ils ont déclaré que les négociations avec Monsanto s’étaient passées dans un climat de partenariat "franc et constructif". Selon ces accords, 70 % des bénéfices reviendront aux Burkinabais…

Mais il n’est pas précisé la part qui reviendra aux cotonculteurs. De plus, pas un mot sur l’épineuse question des brevets. Qu’est-ce que l’ISAAA ? Elle se présente comme une organisation à but non lucratif qui a pour mission de soutenir le développement des pays du Sud. Mais internet nous permet rapidement d’établir ses liens avec Monsanto, avec la Fondation Rockefeller, et avec la Banque Mondiale. L’ISAAA est en fait une agence américaine qui dispose de fonds inépuisables pour promouvoir les OGM sur tous les continents. Elle offre des voyages d’études et des bourses à des scientifiques pour les former aux techniques du génie génétique dans les laboratoires privés et publics des Etats-Unis. Sa stratégie - qui est celle de l’USAID - consiste à cibler les élites d’un pays et à les gagner à sa cause par des arguments sonnants et trébuchants. Elle n’oublie pas les journalistes qu’elle traite bien et à qui elle dispense la bonne information - c’est-à-dire la sienne -donnée par des "experts" payés par la firme. Comment résister au chant des sirènes, quand on est un chercheur ressortissant d’un pays vraiment pauvre ?

En réalité, seuls les instituts de recherche comme le BBA seront généreusement dotés. En contrepartie, il est normal que les chercheurs locaux servent les intérêts des Etats-Unis avant ceux du peuple burkinabais. C’est une nouvelle forme de colonialisme qui se met en place et qui transformera les petits exploitants africains en ouvriers agricoles livrés aux caprices de l’agrobusiness international.

Kass El Diany (Source ATTAC) Nouvelle Libération du 18 juin 2008

Conférence internationale de UE sur le coton Bt au Burkina Faso.

GMO Conférence sur le Coton / Discours d’ouverture / Ouagadougou 16-18 Septembre 2008, Burkina-Faso,

source: 16 septembre 2008/African Press Organization (APO)/

http://appablog.wordpress.com/2008/09/16/gmo-conference-sur-le-coton-discours-d’ouverture-ouagadougou-16-18-septembre-2008/

Discours d’ouverture

Monsieur le Représentant du Secrétariat du Groupe ACP, Monsieur le Président du COS-coton, Monsieur le Représentant du Ministère du Commerce, Monsieur le Représentant du Ministère de l’Agriculture, Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et Chefs de coopération des Etats membres de l’Union européenne, Messieurs les membres de l’AICB, Honorables invités, Mesdames et Messieurs,

C’est avec un réel plaisir que je prends la parole pour vous souhaiter la bienvenue à l’occasion de cette conférence sur le coton génétiquement modifié.

Le coton est une culture importante en Afrique. Il est cultivé dans plus de 30 pays Africains, dont certains parmi les pays les plus pauvres du monde. De plus, il est surtout le fait de petits planteurs, dont les revenus familiaux sont généralement inférieurs aux revenus moyens des familles dans les pays concernés. Le coton est aussi fortement lié à la sécurité alimentaire. On le produit dans des exploitations produisant du maïs, du mil, du manioc et d’autres cultures vivrières. La culture du coton signifie souvent un accès au crédit et aux intrants et, par conséquent, des rendements plus importants pour les cultures vivrières. Le coton est aussi important en termes de création d’emplois. La FAO a estimé que l’emploi total attribuable au coton au niveau des exploitations agricoles du Burkina Faso, Mali, Benin et Tchad comptait à lui seul pour 2 millions de travailleurs. Pour ces raisons, le coton occupe une place spéciale dans la coopération entre l’UE et l’Afrique.

Vous vous souviendrez de la baisse historique du prix du coton au début de ce siècle. L’UE reconnût rapidement les difficultés que cette situation causait aux les pays producteurs de coton en Afrique. En réponse à cela, la Commission Européenne a organisé en juillet 2004 à Paris un Forum sur le Coton, afin de réunir les représentants Africain et Européens. Le résultat de cette conférence a été un accord de Partenariat, basé sur un Plan d’Action pour le Coton établi de commun accord. Ce Plan d’Action a orienté l’agenda de la coopération au développement durant ces trois dernières années entre l’UE et nos partenaires Africains, et continuera à le faire dans le futur proche.

Pour la mise en œuvre du Partenariat UE-Afrique pour le Coton, l’UE a mobilisé des ressources financières importantes. Plus de 260 millions d’euros ont été alloués à des programmes et des projets sur le coton, dont 140 millions d’euros ont été canalisés à travers la Commission Européenne. Ces montants incluent les appuis budgétaires sectoriels, où l’appui au secteur cotonnier a été ciblé, mais excluent les appuis budgétaires généraux aux pays producteurs de coton. L’appui budgétaire général a malgré cela été substantiel et a été une source importante de soutien qui peut être utilisée de manière rapide pour mitiger les effets négatifs de la chute des prix du coton sur les macro-économies des pays concernés. Le montant total que je mentionnais, à savoir € 260 million dédiés au coton, est de loin la contribution la plus importante allouée au coton fournie par un partenaire du développement.

Actuellement, la mise en œuvre du Partenariat bat son plein. La Commission Européenne a décaissé à ce jour 50 millions d’euros, ce qui représente plus d’un tiers du montant total alloué au coton. Les pays concernés par ces décaissements sont nombreux et comprennent entre autres la Centrafrique, la Cote d’Ivoire, le Mali, le Mozambique et le Zimbabwe. La plupart des programmes et projets sont actuellement en pleine mise en œuvre et une augmentation des décaissements peut donc être attendue pour les mois à venir.

La Commission européenne a largement participé également au développement du secteur coton burkinabé à travers des appuis directs à la SOFITEX et à l’Union Nationale des Producteurs de Coton Burkinabé (UNPCB) ainsi qu’aux groupements de producteurs de coton, dans le cadre du mécanisme de stabilisation des exportations “STABEX”. La construction d’infrastructures villageoises et la réhabilitation des routes nationales RN1 et RN4 utilisées pour le transport du coton, en sont des exemples. Plus récemment, dans un contexte de crise financière aiguë de la filière, la Commission européenne a apporté un appui à la définition et à la mise en œuvre d’une stratégie de sortie de crise par les acteurs de la filière, stratégie qui prévoyait notamment la recapitalisation des sociétés cotonnières. C’est dans ce cadre qu’un appui budgétaire sectoriel de 10 millions d’euros, signé en novembre 2007, a permis au gouvernement burkinabé d’assurer la prise en charge, sous forme de don, d’une partie de la participation de l’UNPCB à l’augmentation de capital des sociétés cotonnières. Le décaissement de la première tranche fixe de 8 millions d’euros se fera très prochainement, suite à la décision de recapitalisation de la SOCOMA prise ce 8 septembre 2008.

Les organismes génétiquement modifiés occupent une place prépondérante dans la culture du coton. Le coton génétiquement modifié est cultivé dans de nombreux pays en voie de développement, entre autres en Chine, en Inde, au Mexique et en Afrique du Sud. Son utilisation n’est pas toutefois sans provoquer une controverse. Il y a clairement des avantages et des inconvénients à l’utilisation du Coton Génétiquement Modifié. Les avantages potentiels sont : de meilleurs rendements, des économies en termes de coûts de production et une utilisation réduite de pesticides. Ces avantages doivent être cependant pondérés par les risques que cette culture comporte, tels que l’apparition d’une résistance des insectes au gène Bt, la dissémination du gène modifié, le fait que la technologie ne soit pas adaptée à des petits cultivateurs en culture pluviale, le coût des organismes génétiquement modifiés et les préférences des consommateurs. Le Plan d’Action pour le Coton EU-Afrique prend en compte ce challenge et pose de nombreuses questions importantes pour lesquelles des réponses n’étaient pas encore disponibles à l’époque. Les Organismes génétiquement modifiés contribueront-ils à rendre le coton africain plus compétitif ? Quels sont les possibilités pour les plantes de coton résistantes au stress hydrique ? Quels sont les effets environnementaux ? Les OGM contribueront-ils à créer une dépendance vis-à-vis des multinationales ? Quel est le cadre institutionnel et légal approprié pour l’introduction du coton génétiquement modifié ? Depuis, quatre années ont passé et des informations supplémentaires sont disponibles. La présente conférence a pour objectif de proposer des éléments de réponse à certaines des questions soulevées sur le coton génétiquement modifié en Afrique. Il s’agit donc d’une réponse directe à l’un des résultats attendus du Partenariat EU-Afrique sur le Coton, à savoir la création d’aptitudes pour faciliter la prise de décision informée concernant le coton génétiquement modifié. Sur ce sujet, je suis particulièrement intéressé par l’”outil de prise de décision” qui sera exploré lors de cette conférence.

Je voudrais souligner que le but de cette conférence n’est pas de soutenir l’un ou l’autre point de vue sur les OGM mais bien de permettre une prise de décision en connaissance de cause concernant le coton génétiquement modifié. Le comité de pilotage du Partenariat EU-Afrique sur le Coton a explicitement demandé à ce que les discussions de cette conférence soient basées sur les résultats de la recherché académique, autant que faire se peut effectuée en pays en voie de développement. A l’approche des différentes questions, il est attendu qu’une attention particulière soit accordé aux coûts et bénéfices associés à cette culture pour les petits planteurs, qui constituent le groupe ciblé approprié en Afrique. La conférence ne doit cependant pas couvrir uniquement les volets économiques et agricole, nous nous attendons à avoir une vue d’ensemble qui couvre aussi les aspects environnementaux, institutionnel et légal.

Il est reconnu que l’UE a une approche fortement prudente envers les OGM en général et le coton ne fait pas exception. Lorsqu’il s’agit d’utiliser le coton OGM pour la culture ou pour la consommation alimentaire humaine (huile de coton) ou animale dans l’UE, une procédure élaborée d’autorisation existe, qui inclut une évaluation des risques par l’Agence Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) et une longue procédure d’approbation. Concernant le coton, l’importation de nombreuses variétés dans l’UE a été approuvée pour des utilisations alimentaires humaines et animales. Jusqu’ici aucune requête pour cultiver du coton OGM dans l’UE n’a été effectuée.

Concernant les OGM dans les pays en voie de développement, la CE respecte bien entendu le choix de chaque pays. Dans le cas où un pays décide d’introduire les OGM, la CE encouragerait la mise en place des structures adéquates en rapport avec le cadre législatif, institutionnel, la recherche, la vulgarisation. Cela devrait rendre possible, par exemple, la coexistence entre coton OGM et non OGM, permettant de ce fait aux petits planteurs de choisir d’adopter ou pas les variétés OGM.

Avec ces quelques mots d’introduction, je souhaite que cette conférence remplisse vos attentes et attends avec impatience les résultats qui en ressortiront.

SOURCE : European Commission